Série : Marketing
stratégique
« Vous pouvez tendre une carte
à votre équipe et lui ordonner d'escalader la montagne. Ou bien vous pouvez lui
fournir une boussole et le matériel approprié, lui donner envie de grimper et
l'inviter à vous accompagner » Anonyme
Nous entrons dans une organisation où les dirigeants ont une
idée précise de la position future à laquelle ils aspirent ; les objectifs
commerciaux reflètent la façon dont ils comptent concrétiser la stratégie
adoptée. Le processus de fixation de ceux-ci étant avant tout de nature
descendante, la hiérarchie est tenue de
mettre en harmonie l’action de chaque service ou équipe avec la ligne
tracée. Les objectifs constituent ordinairement une source de
motivation et une force motrice. Pour cela, chacun des collaborateurs se doit de les connaître et d’être responsable
de leur mise en œuvre. (1)
Objectifs et timing de réalisation sont donc explicitement formulés
par écrit et communiqués.
Ils doivent être impérativement bien compris… A cela, il y a
deux raisons corrélatives :
1. La stratégie dépend de l'exécution
L'entreprise est un construit humain ; elle procède
des hommes et femmes qui la constituent. « L’individu apparaît comme
l’élément central de l’organisation, un élément dont l’optimisation du capital
passe par une considération de sa rationalité, de ses mobiles d’action et de
ses finalités ». (2)
Une stratégie, il faut pouvoir et vouloir l’appliquer ; elle vaut ce que
valent les individus chargés
de la mettre en œuvre. Il ne s’agit pas d’imposer une orientation
mais de la discuter avec les acteurs impliqués, d’obtenir leur accord total. Le
personnel, à tous les niveaux, doit partager les objectifs et y adhérer : du
directeur marketing au chef de produit, à l’équipe en charge du DAS, au chef de
groupe… L’énergie fournie pour les
mener à bien sera le carburant de l'entreprise.
Aussi un objectif doit-il être explicite, précis, compréhensible, fédérateur. Il « devient un engagement dès lors qu'il est écrit
noir sur blanc ». (3) Sinon, comment impliquer les
employés, comment concrétiser les actions à entreprendre ? Il s'agit bien de
s'assurer que ceux-ci ont une idée claire des buts poursuivis. On ne peut
s’approprier ce que l’on ne comprend pas.
La communication interne a pour rôle
d'informer chaque collaborateur sur les grandes orientations, les objectifs
poursuivis et les décisions prises. Elle vise à responsabiliser le personnel, à le motiver, à le mobiliser autour d'enjeux
communs. Il faut s’entendre obligatoirement sur les buts et les moyens, indiquer
à quel niveau de responsabilité l’objectif sera réalisé.
J’ai précédemment écrit ceci :
« Les individus sont capables de se dépasser pour une cause, pour
obtenir quelque chose en quoi ils croient. Une vision claire est susceptible de
les rassembler. Chacun est au courant des défis à relever et accepte d'y
prendre une part active. […] A mon sens, l'application la plus efficace, la plus accomplie d'un
plan d'action dépend moins de son degré de perfection que de la volonté, des
attitudes des hommes qui sont chargés de le mettre en œuvre ». (4)
L’objectif est bel et bien responsabilisant
– en ce sens que des
employés bien informés s’impliquent et mesurent l’enjeu de leurs actions. Il
s’agit d’un engagement à atteindre un résultat et c’est bien le sens qui est
donné au système appelé Gestion par objectifs (GPO).
Le dirigeant qui laisse ses subordonnés
le consulter à chaque instant et à la dernière minute, se rend vite compte que
c’est lui qui assume tout le travail. « Responsabiliser ses
collaborateurs en leur accordant des tâches précises et en leur fixant des
objectifs réalisables est le meilleur moyen pour lutter contre ce phénomène de
délégation inversée qui revient à tout mettre sur le dos du manager ».
(5) Il importe de délimiter, d’un commun accord, un espace d’action dans
lequel les employés disposent d’une capacité de décision et d’une marge de
manœuvre.
Attention cependant aux images idéalistes : participer,
s’impliquer, assumer des responsabilités s’avèrent d’ordinaire une charge
lourde. L’individu qui se prête aux contraintes du groupe ne renonce-t-il pas à
sa liberté individuelle comme à la situation confortable de l’observateur-juge ?
De fait, comme l’affirmait Crozier, « la participation n’a de sens pour
un subordonné que si on la lui paye en argent, en pouvoir, en chances pour
l’avenir, car c’est quelque chose qui lui coûte affectivement et
rationnellement ». (6)
2. L'action accomplie est contrôlée
et évaluée
Les objectifs, avons-nous dit,
doivent être communiqués et bien compris. A cela, il y a une seconde raison.
Il s'agit – en cours d'exécution – de suivre, de contrôler et d'évaluer
le travail effectué. On se doit de mesurer a posteriori l'ampleur des efforts fournis, de vérifier qu'ils sont bien en phase avec la
ligne stratégique choisie. Les dirigeants peuvent se servir des objectifs comme
des points de référence, comme des étalons de mesure des performances
individuelles et collectives.
En plus d’être responsabilisant, l’objectif
est ainsi vérifiable et gratifiant
: d’une part, les moyens de contrôle doivent être connus et acceptés
comme étant fiables et équitables ; d’autre part, l’effort fourni et les
résultats obtenus doivent être récompensés
sur les plans moral et matériel.
Dans les agences bancaires au Maroc,
les objectifs commerciaux sont imposés et contrôlés par la direction. Quatre en
particulier constituent une source d’angoisse permanente – sans être
nécessairement gratifiants : les dépôts collectés (ouvertures de compte), les
produits placés (cartes bancaires, crédits, bancassurance, épargne), les
recouvrements, la qualité de la relation client. Le problème majeur est que le second
objectif va tendanciellement à l’encontre du quatrième : les abus que les
commerciaux se permettent au détriment de la satisfaction du client sont hélas bien
connus. (7)
Thami BOUHMOUCH
Octobre
2015
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(1) Cf. article
précédent : Il n’y a pas de stratégie sans objectifs. http://bouhmouch.blogspot.com/2015/09/il-ny-pas-de-strategie-sans-objectifs.html et l’article : Un objectif commercial doit être opérationnel.
http://bouhmouch.blogspot.com/2015/09/un-objectif-commercial-doit-etre.html
(2) Henri T. Teko et Yves Bapes, https://sociologies.revues.org/3204
(3) O. Benaini (LMS),
cité par le périodique La Vie éco du 29/07/2005.
(4) Cf.
mon article (mai 2011) : Le premier
client marketing est à l’intérieur de l'entreprise. http://bouhmouch.blogspot.com/2011/05/le-premier-client-marketing-est.html
(5) Cf.
http://www.petite-entreprise.net/P-1928-81-G1-les-10-erreurs-manageriales-les-plus-frequentes.html
(6) Michel
Crozier, La société bloquée, éd du Seuil, 1970.
(7) Cf. La Vie éco du 15/03/2010.
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