Série : Marketing
stratégique
L’entreprise se doit impérativement
de mettre en harmonie l’activité de chaque service, de chaque équipe avec la
ligne stratégique tracée. Les
objectifs visent l’action, constituent une source de motivation et une force
motrice. Chacun des collaborateurs, à tous
les niveaux, est tenu de les connaître et être responsable de leur réalisation.
C’est le sens qui est donné au système Management/Gestion par Objectifs (MPO ou
GPO). Les objectifs fixés doivent être opérationnels et de là répondre à des critères : ils sont nécessairement quantifiés, réalistes, cohérents entre eux et
hiérarchisés.
Des
objectifs quantifiés
Vous lisez dans la presse que Poste Maroc a misé sur une clientèle à bas revenu, qu’ « elle
vise à améliorer la bancarisation et canaliser la petite épargne ». Un tel objectif
est-il opérationnel ? Non, il manque l’indication des chiffres et un délai ! Lorsqu’on déclare que « la marque LG ambitionne de
vendre 11 millions de mobiles sur le marché mondial », on met bien en
avant un objectif chiffré, mais il manque la date. « Gagner de
l’argent, avoir une bonne part de marché, améliorer le service à la clientèle,
ne sont pas des objectifs, ce sont des désirs. Quelle est la différence ?
Un désir peut être vague et qualitatif. Un objectif est précis et quantifiable ».
(1)
Certes, il
y a bien des dirigeants qui cherchent à mobiliser leurs équipes autour
d'objectifs quantitatifs et qualitatifs. En particulier, dans le cas des
produits de prestige, « il serait dangereux de ne se fixer que des
objectifs de volume et de rentabilité. On risquerait alors de mettre en œuvre
des stratégies de marketing efficaces à court terme mais nuisibles à long terme
à l’image de la marque ». (2) Pour autant, un objectif
commercial est loin d’être une déclaration d’intention ; pour savoir s'il
est atteint, il doit être explicite, mesurable et daté.
Contrairement aux objectifs
généraux, les objectifs commerciaux sont en effet immanquablement chiffrés.
Même lorsque l’objectif a une allure qualitative, il est toujours quantifié. Il
en est ainsi de l’objectif de satisfaction des clients, de celui portant sur
l’image de la marque… On dira par exemple pour le premier : « le
taux de satisfaction devra passer de 68 % à 80 % », pour le
second : « notre marque doit être bien perçue par 60 % des
consommateurs ». Qui plus est, « ces objectifs sont […]
chiffrés pour permettre de mesurer l’ampleur des efforts à consentir et la
progression pour les atteindre ». (3) Le chiffrage permet ainsi d’évaluer périodiquement sa concrétisation et
de corriger les écarts éventuels entre la situation de départ et la
situation d'arrivée.
L’objectif, en plus de préciser un
niveau de réalisation, indique clairement un délai de réalisation –
telle quantité, tel pourcentage, à telle date. Il
n'est pas fixé pour une période indéfinie mais avec un terme précis (semaine,
mois, trimestre, année) et une date d'échéance ferme. L’intervalle d'obtention sera long pour l’ensemble de
l’organisation (de 3 à 5 ans), moins long pour un directeur commercial (un an),
court (1 semaine, 1 mois, 3 mois) pour un vendeur ou une équipe.
En somme, on ne visera pas une « augmentation
globale du chiffre d'affaires », mais une « augmentation du CA
de 5 % pendant les 3 premiers mois et de 8 % le reste de l'année » ;
on ne dira pas qu'il « faut accroître la rentabilité
des investissements », mais qu’il faut « faire passer le taux
de rentabilité de 9 à 12 % en deux ans ». Jet sakane, par exemple, s’était fixé l’objectif de construire
20.000 logements sociaux et de standing à Casablanca, Agadir, Marrakech et
Tanger à l’horizon 2011. Combien et quand : les deux variables sont chiffrées.
Notons, pour plus de précision, que
l'objectif est exprimé en termes absolus (CA en dh, production en unités,
nombre de clients à prospecter…) ou/et en termes relatifs (part de
marché, croissance des ventes en %, résultat net en % du CA, frais généraux en
% des charges…).
Des objectifs réalistes
Le
chiffrage clair des orientations choisies exige de faire preuve de réalisme. Un objectif
commercial doit avoir les plus grandes chances d’être atteint. Il doit être réaliste
et réalisable – quant au résultat souhaité et au délai accordé.
Voilà pourquoi l’objectif est fixé après
et sur la base de l'analyse-diagnostic. (4) Les chiffres arrêtés
découlent des études de marché (analyse des
opportunités offertes)
des ressources internes et des possibilités d'expansion de
l'entreprise (analyse du potentiel). Un objectif commercial résulte de
l'analyse SWOT ; on ne peut le fixer avant. Il est réaliste,
c’est-à-dire raisonnable et atteignable compte tenu du
contexte, de la conjoncture.
Du reste, pourquoi fixer un objectif
irréalisable au risque de décourager ceux qui ont la
responsabilité de l’atteindre ? Un objectif amplifié, trop ambitieux peut
conduire à une démotivation. S’il est démesuré, il engendre des
frustrations et des dysfonctionnements ; l’entreprise est stressée… Il
ne doit pas être non plus trop facile afin de stimuler l’effort, de maintenir
une forte mobilisation. En effet, « un bon objectif constitue un
défi réaliste, c’est-à-dire qu’il ne sera pas impossible à atteindre mais
requerra un effort de la part de ceux qui seront chargés de l’atteindre ».
(5)
Des
objectifs cohérents entre eux
Pour être
intégrés à un système de MPO, les objectifs doivent aussi être cohérents – en ce sens qu’ils
doivent être compatibles entre eux. Par exemple, la
diversification des risques et la prospection de nouveaux marchés sont bien concordants.
Les objectifs sont d’ailleurs dits réalistes s’ils s’accordent
les uns avec les autres. Ils
sont cohérents dans la mesure où ils sont interdépendants, se complètent.
Il est clair que l’augmentation des ventes tend à celle de la part de marché.
A contrario, les objectifs ne sont
pas cohérents s’ils se contredisent, entrent partiellement en conflit.
Tous les objectifs que l'on s'efforce d'atteindre ne peuvent être atteints simultanément ;
tous n’ont pas la même importance. Supposons qu’on ait fixé deux
objectifs : maximiser le CA et augmenter la marge unitaire. Le premier
exigera d’améliorer la qualité, de diminuer le prix, d’accroître les dépenses
publicitaires. Ne pourrait-on pas alors s’attendre à un impact négatif sur les
bénéfices ? De fait, il y a lieu de s'efforcer d’arbitrer entre les
objectifs, de privilégier ceux qui sont prioritaires. Il s’agit de trouver un équilibre entre marge unitaire et part de marché, entre
ventes immédiates et développement de nouveaux marchés, entre
bénéfices à CT et bénéfices à LT, entre sécurité et croissance…
Des objectifs hiérarchisés
Outre l’impératif
de cohérence, les objectifs doivent enfin être hiérarchisés.
L’idée
est simple : les objectifs sont définis logiquement à plusieurs niveaux
hiérarchiques. L’objectif marketing global est ainsi découpé en sous-objectifs
spécifiques, par domaine d’activité (DAS), par unité, division ou service, par
équipe, par individu.
D'où une cascade d’objectifs et sous-objectifs organisés en réseaux (sous forme
arborescente) et pas
seulement listés les uns à la suite des autres.
Dire que les objectifs sont hiérarchisés, c’est dire que leur progression est graduée.
Thami BOUHMOUCH
Septembre
2015
______________________________________________
(1) J.-P.
Sallenave et A. d'Astous, Le marketing de l'idée à l'action, éd.
Simex, p. 214. Les auteurs parlent ici de l’objectif commercial.
(2) J. Lendrevie
et D. Lindon, Mercator, éd. Dalloz, p. 549.
(3) C. Demeure, Marketing,
éd. Dalloz, p. 92. Je souligne.
(4) Cf.
articles précédents : Le modèle LCAG/SWOT :
une analyse en deux volets http://bouhmouch.blogspot.com/2015/06/le-modele-lcagswot-une-analyse-en-deux.html
et Synthèse
SWOT/LCAG : les éléments identifiés sont confrontés http://bouhmouch.blogspot.com/2015/08/synthese-swotlcag-les-elements.html
(5) J.-P.
Sallenave et A. d'Astous, op. cit., p. 215.
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