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9 septembre 2015

ÉVOLUER, SE RENFORCER GRACE AU BENCHMARKING


Série : Marketing stratégique 

Les forces et faiblesses de l'entreprise, nous l’avons vu, sont toujours identifiées et analysées par référence aux concurrents les plus significatifs. (1) De là ces questions : comment être performant, mettre en œuvre un plan en impliquant tous les collaborateurs ? Comment attirer de nouveaux clients tout en gardant les anciens ? Comment repérer et caractériser l'insatisfaction ? Comment mieux gérer les stocks, mieux livrer les marchandises ?...
Les réponses judicieuses ne sont pas faciles, mais elles existent bien quelque part. Le benchmarking est né de ce raisonnement. (2) Il y a avantage à trouver des modèles dans les entreprises connues pour leurs compétences dans le domaine visé. On ne réinvente pas la roue ! C’est ce que l’ex-PDG de RAM disait naguère à juste titre : « A la RAM, nous n'avons pas réinventé le monde. Nous avons juste procédé au lifting des expériences de ce qui se pratique chez les majors du transport aérien mondial ». (3)

Le benchmarking, c’est quoi, comment ?
Le benchmarking (étalonnage) est un processus continu de recherche, d’observation et d’évaluation des pratiques de gestion d’une organisation tierce. Il est considéré comme « une pêche aux bonnes idées ». Il permet aux entreprises de ratisser large, d’identifier des sources possibles d’amélioration, de se donner des objectifs ambitieux. Il concerne tout autant les grands groupes que les PME.
Le terme benchmark, emprunté aux géomètres, désigne un repère servant de point de référence pour des comparaisons de direction et d'élévation. Appliquée au management, la démarche permet à l'entreprise de trouver des modèles en dehors de son contexte propre afin de tendre vers l'excellence.
Dans cette optique, le benchmarking « est l’une des expressions du dispositif d’intelligence économique » et celle-ci « se situe dans une logique d’apprentissage permanent […],  favorise l’inspiration par l’imitation légale et l’adaptation culturelle ». (4) L’adaptabilité, en effet, est la pierre angulaire des stratégies. La capacité d’apprentissage, l’innovation managériale sont le secret de la compétitivité. Benchmarker n'est pas copier, mais s'approprier intelligemment les pratiques réussies. L’idée est de saisir les clés des performances pour s'en inspirer et en retirer le meilleur. Une entreprise qui apprend se sert des procédés d’autrui comme d'un étalon ; elle tend à s’adapter, à se remettre en question en fonction des défis.
Le processus suit un ordre logique.  Il consiste d'abord en l'évaluation des ressources, compétences et potentiel de l'entreprise apprenante. Il commence donc par un diagnostic interne qui détermine les domaines dans lesquels celle-ci veut s'améliorer. Une entreprise-modèle est alors identifiée, puis des informations à cet égard sont collectées et évaluées (sources : médias, organisations professionnelles, récompenses internationales…). Une comparaison est ensuite méthodiquement effectuée et les écarts constatés sont analysés — donnant lieu en conséquence à des dispositions d’adaptation.
La démarche, en d’autres mots, « consiste à sélectionner un thème stratégique (par exemple, le développement des produits) ou un processus clé (le traitement des commandes, la facturation…) ou encore une fonction opérationnelle (les achats, l'accueil téléphonique…), puis à analyser les pratiques d'une ou de plusieurs entreprises tierces, considérées comme les meilleures dans le domaine choisi, pour en tirer des enseignements applicables dans sa propre société ». (5) Le benchmarking porte sur les méthodes et systèmes d’organisation, les politiques marketing, comme sur les tâches opérationnelles (équipe commerciale, service achats…). D’où, entre autres, le démontage et l’analyse du produit concurrent, l’étude de la fonction marketing, l’évaluation de divers procédés, tels le traitement des commandes, la livraison de marchandises, la gestion des stocks, le service clients, l’accueil téléphonique, le suivi des réclamations…
Le benchmark est un indicateur chiffré — dans un domaine donné (qualité, délais…) — des performances réalisées par l’entreprise de référence. Il porte par exemple sur la marge sur chiffre d'affaires, les ventes par employé, le taux de fidélisation, les réponses aux réclamations… Mais l’évaluation peut s’étendre à des données qualitatives, c’est-à-dire à l’organisation en tant que construit humain, à sa culture, à ses croyances et à l'impact de celles-ci sur la mobilisation de son capital humain.

Quelles entreprises-modèles ?
Peut-on s’inspirer des autres, reproduire leurs pratiques ? Jusqu’à quel point ?... En toute logique, le benchmarking implique la réciprocité : il s’agit d’une analyse comparative qui suppose une attitude coopérative. On cherche en principe à connaître les points forts de l’autre, tout en acceptant de transmettre des informations sur ses propres procédés (servant de monnaie d'échange)… On sait cependant que les entreprises sont rarement disposées à laisser filtrer des informations précises. Au Maroc, le marché de la margarine est un marché jeune, constitué de quelques unités de production (dont Margafrique, Indusalim et Unilever) ; la concurrence étant vive, chacun des intervenants reste discret sur sa politique et aucun dialogue ne semble possible. Aussi, en pratique, le recueil de l'information se fait-il par observation, par déduction et par tâtonnement…
Ici, il faut s’empresser de souligner un point majeur : l'art de s'emparer des performances d’autrui est une pratique vieille comme le monde, mais elle a longtemps été cantonnée au strict champ concurrentiel. Le benchmarking ne se limite pas aux concurrents ; il  se combine souvent avec la veille concurrentielle, sans se confondre avec elle. C’est, peut-on dire, « une des modalités de veille concurrentielle » (6) La comparaison peut se faire avec des entreprises de tout secteur. Le benchmarking « ouvre la comparaison à d'autres secteurs d'activités, parfois radicalement éloignés de celui de l'entreprise et, au-delà des comparaisons de performance, tente de cerner les méthodes et les processus opérationnels mis en œuvre par d'autres entreprises ». (7)


L'entreprise observée, perçue comme plus innovante, ne fait pas partie nécessairement du même secteur d'activité. Telle banque qui cherche par exemple à améliorer son taux de fidélisation pourrait s'inspirer de Club Med (procédés de prise en charge des clients) et du groupe hôtelier Hilton (culture tournée vers l'accueil)... L’industrie pharmaceutique et celle du bâtiment ont un point commun : dans les deux situations, le client final est dépendant du prescripteur et celui-ci n'est pas le payeur. Ces deux secteurs d'activité très différents ont à apprendre des méthodes et processus commerciaux l'un de l'autre.

Thami BOUHMOUCH
Septembre 2015
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(1) Cf. article précédent : Analyser la capacité stratégique : pourquoi, comment ? (07/2015) http://bouhmouch.blogspot.com/2015/07/analyser-la-capacite-strategique.html
(2) Cf. article précédent : Veille itérative et benchmarking (09/2013)  http://bouhmouch.blogspot.com/2013/09/veille-iterative-et-benchmarking.html
(3) Cité in L'Economiste du 29/01/98.
(5) Voir article : Améliorer ses résultats avec le benchmarking, L'Essentiel du Management, 09/1997.
(7) Article de L'Essentiel du Management, op. cit.



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