Série : Marketing
stratégique
L’individu ordinaire lui aussi planifie
sa situation future : il envisage l'acquisition d'un logement, un placement
financier, l’achat d’une nouvelle voiture ou autres… Mais avant d'agir, il
fait le point : il évalue son statut professionnel (précaire, stable ou prometteur),
le niveau de son revenu et les dépenses assumées... Des variables exogènes sont
de plus considérées : état du secteur immobilier, taux d'intérêt pratiqués, évolution
de la bourse, situation actuelle et prévisible de l'organisme employeur…
Dans le monde des affaires – comme d’ailleurs
dans le domaine militaire – les choses ne se passent pas autrement. L'entreprise,
avant d’élaborer une stratégie, doit faire le point de la situation, choisir le
terrain sur lequel elle veut se battre, puis comment elle va se battre. La
planification marketing se définit comme un processus d'anticipation des possibilités
de l'entreprise et des changements qui surviennent dans l'environnement
global.
De cette
analyse situationnelle, il convient ici en deux mots de saisir l’enjeu considérable, avant d’y revenir plus longuement par la
suite.
Pour éviter bien des erreurs, on s’interroge avec clairvoyance et objectivité
sur ce qu’on est, ce qu’on fait, l’environnement dans lequel on se situe, la
position qu’on y occupe… Le problème de l'entreprise marocaine est le
même que celui des entreprises européennes, asiatiques ou américaines : durer
dans le temps, se remettre en cause périodiquement.
Comment,
en toute logique, pourrait-on concevoir une ligne stratégique et tracer formellement
le chemin à suivre, sans procéder à une analyse
méthodique de l’organisation et des influences externes ? C’est à
partir de l’évaluation des capacités internes et des caractéristiques du marché
que les facteurs clés de succès sont décelés et que des orientations peuvent
être définies. C’est bien de cette
double analyse que découle la fixation des objectifs marketing.
Evaluer l'entreprise consiste à porter
une appréciation globale sur son état de santé, à mettre à plat sa situation
effective, ses attributs, ses atouts et ses contraintes. C’est le diagnostic
d’entreprise ou étude du potentiel. L'investigation porte en particulier sur les moyens
financiers, les capacités techniques, le potentiel humain et le savoir-faire
marketing. Mais
cela n’a de sens que si l’on s'informe rigoureusement sur tous les éléments qui
gravitent autour de l’organisation. Nul ne saurait travailler de façon
nombriliste. Il s’agit de se placer par
rapport à son champ concurrentiel, d’apprécier ses ressources et ses compétences distinctives face à
toutes les variables externes susceptibles de modifier les conditions du marché.
Les variables en question relèvent
d'abord de l'environnement spécifique/immédiat de l'entreprise ou micro-environnement
(clients, partenaires, concurrents…) ; elles relèvent également des tendances
de l’environnement général ou macro-environnement (évolution économique,
socioculturelle, technologique, institutionnelle…).
L’organisation procède ainsi à une
investigation en deux volets, interne et externe. Tout se passe comme si l’analyste-décideur était
devant une fenêtre : dans un premier temps, il regarde en dehors pour évaluer le
présent et discerner l'avenir (évolution prévisible) ; dans un deuxième temps,
il se retourne pour examiner les composantes et les caractéristiques de la
pièce dans laquelle il se trouve.
L’analyse-diagnostic – pour chacun des
domaines d’activité éventuels – fait apparaître les lacunes ou/et les
performances de l'entreprise ;
elle permet de faire coïncider les attraits
et les atouts. Elle fait
le bilan des forces et faiblesses, des opportunités et menaces (FFOM).
La nécessaire confrontation des deux
volets a donné lieu au modèle LCAG (initiales des noms des 4
professeurs de la Harvard Business School qui l’ont proposé en 1965 : Learned, Christensen, Andrews, Guth). Ce
modèle est connu aussi par
le sigle SWOT (Strength, Weakness, Opportunity,
Threat). C’est le premier modèle d’aide à la
planification stratégique. Il
représente toujours une base de référence importante en tant qu’outil d'analyse,
bien qu'il simplifie quelque peu la réalité et prédispose à une vision
mécaniste de la démarche.
La matrice SWOT peut être
utilisée en évaluation ex-ante pour définir les axes stratégiques et
juger de leur pertinence, ou pour vérifier l’efficience et la cohérence des
programmes en cours. Elle « suppose une anticipation de
l’action stratégique qui n’est compatible qu’avec des environnements stables et
prévisibles ». (1)
On notera enfin que pour s'informer
continuellement sur son environnement, c'est-à-dire sur des facteurs qui sont
hors de son contrôle direct, le praticien est amené à mettre en place un
système d'information marketing. Grâce à cela, il est possible de détecter les
opportunités pour en tirer profit et de contourner les menaces qui peuvent nuire
à l’activité. L’analyse-diagnostic, une fois réalisée et validée par la
hiérarchie, est formalisée dans un document accessible aux divers acteurs
concernés. C’est une phase majeure de la réflexion stratégique. (2)
Thami BOUHMOUCH
Juin
2015
________________________________
(2) Son déroulement
sera examiné en détail au long des prochains papiers.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire