Série : Marketing stratégique
Un produit est un moyen, pas une fin
; c'est un vecteur porteur d'utilités, un ensemble de solutions perçues
par le consommateur. (1) Celui-ci n'achète pas toujours ce que nous
croyons lui offrir. Il achète les acquis bénéfiques qu’il compte tirer de
l'emploi des produits.
Pour
l'entreprise, l’acquisition d’un avantage-produit constituera un atout
concurrentiel seulement si l’élément distinctif est perçu positivement
par le client, s’il satisfait un besoin réel et patent ;
faute de quoi, il risque de paraître comme une bagatelle, un gadget. Si un attribut
doit être mis en avant et souligné, c'est en fonction des exigences du public
cible… Le consommateur est juge. C'est sa perception qui confère ou non au
produit proposé un avantage par rapport à un autre. Réceptif à la valeur escomptée,
c’est lui qui détermine si le produit est « meilleur ».
Rappelons-nous le ruban adhésif de marque Scotch et la bouteille PET de Sidi Harazem.
(2) Le premier n’est pas visible à la photocopie, se déroule sans
bruit, permet l'écriture et ne jaunit pas en vieillissant… Il est clair que l’avantage-produit
n’est effectif que si l’acheteur considère que ces attributs répondent à ses exigences.
La bouteille PET, quant à elle, n’est pas meilleure parce qu’elle est
rétractable, mais parce que les acheteurs potentiels considèrent que cet
attribut est important et confère au produit une supériorité (une conservation
plus saine) par rapport aux autres bouteilles.
Duracell
Ultra Power
est la seule pile dotée d’un testeur de charge intégré (« Powercheck »),
permettant de connaître la quantité d'énergie restante. Ce testeur est censé
constituer un avantage intrinsèque des piles alcalines. Or, le consommateur
marocain moyen ne semble guère tenir cet attribut pour un critère de choix. Il s’estime
en mesure d’évaluer lui-même le niveau d’autonomie des piles… Peut-on en
l'occurrence parler d'un atout concurrentiel ?
Lorsque
l’avantage porte sur le prix (stratégie de domination par les coûts), il est
nécessaire là encore que le public visé soit réceptif à la baisse consentie,
qu’il tende à réagir favorablement aux offres bon marché. Il
en est ainsi des produits de grande consommation comme des produits industriels,
lorsque l’acheteur est en quête du « meilleur produit
au meilleur prix ». Dans
un tel cas, il est nécessaire justement que le consommateur
comprenne bien que
l’offre est centrée sur l’essentiel, que le low cost n’est pas atteint au
détriment de la qualité.
Il s'ensuit que l’avantage concurrentiel
attendu par le client doit être facilement
reconnaissable. Il doit être
communiqué par la publicité ou/et par les vendeurs (à condition de ne
pas exagérer les bénéfices procurés par le produit)… Plusieurs
exemples viennent à l’esprit.
Le système de suspension adopté dans
les années 90 par la marque Citroën pour ses modèles haut de gamme
empêche le véhicule de s'incliner dans les virages. C’est un élément distinctif
que les vendeurs dans les show-rooms se faisaient un devoir de mettre en avant.
Les
glaces Häagen-Dazs passent pour être
tout à fait naturelles (pas de colorants, ni de produits chimiques) ; la
boule pèse 90 grammes ,
soit le double des autres et fond moins rapidement, car elle contient à peine
24 % d'air contre plus de 75 % chez les concurrents. La question est de savoir
si ces attributs positifs sont perçus en tant que tels par le consommateur…
BMCE
Bank
a naguère mené plusieurs actions en faveur de la protection de l'environnement.
Elle a sponsorisé l'émission écolo Dounya et le Salon de l'environnement
Protech ; elle a utilisé du papier recyclé pour l'édition des revues
internes, du courrier et du rapport annuel. Le problème est que ces actions
n'étaient pas visibles par le grand public.
Par
ailleurs, pour aller d’une ville à une autre, en quoi est-il de l’intérêt de
l’automobiliste d'emprunter l'autoroute plutôt que la route nationale ? En plus
des gains de temps et une plus grande sécurité, les avantages sont multiples :
les conditions de circulation sur une route à péage se traduisent pas une baisse
appréciable du coût d'exploitation des véhicules (CEV). La réduction des
fréquences de freinage et d'accélération, en effet, agissent directement sur la
consommation de carburant et l'usure des pneus. Pour autant, la société ADM
(Autoroutes du Maroc) il y a vingt ans, ne faisait pas le nécessaire pour
amener les conducteurs concernés à percevoir et apprécier ces attributs
intrinsèques…
C’est assez dire que l'avantage
concurrentiel, quel qu’il soit, se doit d’être exploité commercialement.
La stratégie marketing consiste à le convertir en termes aisément perceptibles
par le public cible, dans le but d'atteindre les objectifs commerciaux établis.
Il faut faire en sorte que le consommateur perçoive le caractère
distinctif et l’apprécie suffisamment pour préférer le produit offert
par l'entreprise à ceux des concurrents.
Thami BOUHMOUCH
Février
2016
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(1) Cf. papier
précédent : Le
client s'attache aux solutions,
pas aux produits http://bouhmouch.blogspot.com/2012/05/le-client-sattache-aux-solutions-pas.html
(2)
Cf. articles : L’enjeu de l’avantage compétitif http://bouhmouch.blogspot.com/2016/01/lenjeu-de-lavantage-competitif.html
et Les sources de l’avantage competitif http://bouhmouch.blogspot.com/2016/02/les-sources-de-lavantage-competitif.html
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