Série : Compréhension
du consommateur
Le consommateur est regardé à juste titre comme versatile et
imprévisible. La
part d’irrationalité et d’affectivité dans ses prises de décision est
suffisamment tangible pour ne pas être réfutée. Vouloir expliquer et comprendre
le comportement d'achat, c'est vouloir expliquer et comprendre le comportement
humain (cf. papier précédent)… Mais comprendre quoi au juste ? Dans quelles conditions particulières se
déroule le processus d’achat ? Quelles sont les variables
susceptibles de l'affecter ? L'entreprise cherche non seulement à élucider
les choix et préférences de l’acheteur, mais éventuellement à les prédire. De
ce fait, comme les phénomènes examinés sont difficiles à saisir, l’analyste s'efforce
de les représenter sous forme d’un modèle descriptif.
De nos
jours, pour arriver à cerner les habitudes de consommation de sa clientèle, l'entreprise
ne peut plus compter sur les seuls contacts physiques. D’où le recours aux
travaux de praticiens et de chercheurs en marketing. Certes, les consommateurs ne
sauraient être mis sous équation, n’entrent pas
réellement dans des catégories prédéfinies. Le processus d’achat, néanmoins, a fait
l’objet d’une modélisation. Il a été modélisé synthétiquement, du fait
même de la complexité observée et malgré celle-ci. Un modèle, selon une
conception communément admise, est « un construit théorique qui
simplifie la réalité au moyen d'un schéma présentant une structure logique ».
(1)
Les modèles
synthétiques expliquent les comportements par le jeu d'associations stimulus-réponse.
L’analyste, en effet, « propose d’appréhender l’acheteur ou le
consommateur comme un système générant des réponses consécutivement à des
stimulations marketing ». (2) Sans prétendre
reproduire la réalité stricto sensu, l’approche théorique fournit une
représentation simplifiée du processus d’achat et permet une meilleure
compréhension de la formation des préférences. Simplifier ne veut nullement
dire dénaturer les faits, ni supprimer tel ou tel facteur déterminant. « Les
modèles doivent être suffisamment simples pour pouvoir être effectivement
utilisables tout en étant suffisamment élaborés pour ne pas tomber dans la
caricature ». (3)
Le plus connu des
modèles descriptifs introduits en marketing, présenté dans la figure ci-après,
est sans conteste celui de J.-A. Howard et J.-N. Sheth (1969). Il met en évidence
les éléments constituants, jugés essentiels, ainsi que les relations existant
entre ces éléments.
Le modèle global simplifié
fait apparaître quatre blocs d’éléments :
1. L'acte d'achat
suppose le suivi d'un processus par le consommateur. Il commence par la
détection d'un besoin – lequel est soumis à diverses stimulations. Dans sa vie
quotidienne, l’individu réagit en particulier aux signaux incitatifs émis par
l'entreprise. Ce sont les stimuli
commerciaux, le point d'entrée du modèle. Ils correspondent aux
différentes variables de l'action marketing : caractéristiques du produit, forme
du conditionnement, niveau du prix, opération promotionnelle, message publicitaire,
prospectus distribué, action du vendeur… De tels inputs sont les facteurs qui
déclenchent le processus d'achat. La sensibilité du consommateur aux informations
d’entrée dépend de ses prédispositions vis-à-vis de la marque et aussi du degré
de clarté du stimulus.
2. Le processus de décision
(interne) intervient à la suite de l’exposition aux stimuli. Les comportements
de réponse sont déterminés par l’exploitation ou la transformation de l’information
reçue (activement ou passivement). Celle-ci, à l'intérieur de la « boîte
noire » du consommateur, est décodée, traitée et analysée. Une fois acceptée,
elle est stockée dans sa mémoire. Ce processus est l'élément fondamental du
modèle. Il diffère suivant la rationalité de l'individu et sa vision propre des
choses.
Chercheurs et praticiens
consacrent beaucoup de temps à l'étude de l'impact des stimuli marketing sur
les décisions d’achat. Il s'agit de comprendre le mieux possible pourquoi un
consommateur retient ou non une information, comment se transforment dans son
esprit (cerveau) les signaux transmis.
3. L'acte d'achat
suppose ensuite la manifestation d’une réponse (output). L’information
traitée est ainsi transformée en une réponse observable : achat ou non-achat. Une
réponse d’achat est bien sûr adoptée si l’attitude à l’égard du produit est
positive. En fait, la décision porte sur divers éléments ou facettes et donne
lieu à plusieurs choix : le produit, la marque, le budget consacré, le
point de vente, le moment d'achat…
4. L’appréciation
des signaux reçus et les décisions ne s'effectuent pas dans le vide : le
consommateur est soumis – consciemment ou non – à l’influence subtile de facteurs
endogènes (personnels) et de facteurs exogènes (liées à
l’environnement social)… Chacun d’eux influe dans des proportions plus ou moins
grandes sur le comportement d'achat.
Les facteurs endogènes,
spécifiques à l'acheteur, influent directement sur les réactions à l'environnement
commercial. Un individu donné ne ressemble pas tout à fait à un autre. Il a ses
propres motivations et croyances, une expérience personnelle, une image de
lui-même, une profession et des revenus particuliers, des attitudes et un
tempérament spécifiques. Il est également influencé par des facteurs
d'environnement, tels la famille d’appartenance, les groupes de pairs ou
d’aspiration auxquels il se réfère, la classe sociale dont il est membre, la culture
dans laquelle il baigne...
Il apparaît ainsi que
le comportement d'achat, pour l’essentiel, est la résultante d’un processus de
décision et de variables d'influence (explicatives). L'homme de marketing exerce
peu de contrôle sur ces diverses composantes ; pour autant, il doit les appréhender
avec la plus grande rigueur possible et en tenir compte dans ses décisions.
Thami BOUHMOUCH
Juin 2014
________________________________________
(1) Ph. Kotler, V. Di
Maulo, G. McDougall, G. Amstrong, Le marketing de la théorie à la pratique,
éd. Gaëtan Morin, p. 62.
(2) Richard Ladwein, Le comportement du consommateur et de l’acheteur, éd.
Economica, p. 259.
(3) Guy Audigier, Les études
marketing, éd. Dunod, p. 41.
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