Série : Politique internationale
La vie des gens dans nombre de pays est largement régie et affectée par des acteurs internationaux suffisants, cyniques et malveillants, qui détiennent un pouvoir colossal visant à perpétuer le monde injuste qu’ils ont œuvré à créer. Les peuples occidentaux sont séparés hermétiquement du reste du monde. Ils sont soumis à un matraquage médiatique et ignorent tout des forfaits et malheurs qui ont lieu hors de leur sphère.
Les Etats-Unis (les
plus gros consommateurs de drogues) incarnent en premier lieu et dans une large
mesure cette profonde ignominie. Au sein même du pays, les citoyens
afro-américains et amérindiens vivent une situation sociale alarmante, sont
victimes toujours et au quotidien de discriminations effarantes. A ce titre, Noam Chomsky écrit : « Les
Etats-Unis ont été un pays très raciste pendant toute leur histoire et pas
seulement à l’encontre des Noirs. C’est une société de colons. Le colonialisme
de peuplement c’est ce qu’il y a de pire comme impérialisme, le genre le plus
sauvage parce qu’il requiert l’élimination de la population indigène. Ce n’est
pas sans relation, je crois, avec le soutien automatique des Etats-Unis à
Israël, qui est aussi une société coloniale ». (1)
Immédiatement après la chute du mur de Berlin, les
Etasuniens ont conçu une nouvelle stratégie. Le message principal fût le
suivant : rien ne va changer… sauf les prétextes. Ils ont clamé
leur besoin impérieux d’une force militaire gigantesque, bien que la menace
russe ait cessé d’exister. Par la suite, le monde s’est accoutumé à les voir
parader tous azimuts, emplis de morgue, la main sur la crosse du revolver. Ils
se mêlent de tout, flagornant les uns, menaçant les autres. Ils ne sont pas estimés…
et ils le savent. Regardez leurs ambassades et consulats : le summum de la
paranoïa et des lubies tyranniques est allègrement atteint. Des barricades
grotesques en ciment enjambent les trottoirs, débordent même sur la chaussée, exaspèrent
les passants.
La doctrine qui sous-tend la politique étasunienne est une
doctrine mafieuse selon laquelle toute opposition même timide aux desseins
géopolitiques de l’Empire, où qu’elle soit, doit être réprimée par un usage extrême
de la force. Washington a ainsi créé le plus puissant appareil militaire
jamais vu dans l’histoire : l’Otan. Son but est tout simplement de se
substituer à l’ONU. A n’en pas douter, la militarisation démesurée du monde
rend l’avenir de l’humanité de plus en plus périlleux. Les Etats-Unis engagent
36% du total des dépenses militaires globales évaluées en 2018 à 1822 milliards
de dollars. Ils détiendront pour longtemps encore le premier budget militaire
du monde. (2)
Pour comprendre pourquoi certaines contrées sont continuellement en conflit, cherchons quelle partie a intérêt à ce que cette situation perdure. Qui dit conflit dit besoins d’armes. Et les armes, il faut bien qu’un intervenant quelque part les produise. Cet intervenant se trouve par-dessus tout aux Etats-Unis. Ce pays est le plus gros vendeur d’armes de par le monde. En 2019, sa part du commerce de la mort et de la destruction représentait près de 36 %... (3) Et que faire si la demande d’armes se mettait à diminuer ? C’est simple : Washington provoque ou envenime les antagonismes ici ou là afin de liquider ses invendus. « Il nous reste des missiles et des F-35 ? Ok, trouvez-moi un prétexte quelconque dans ces bleds là-bas, on fera de la place ! ». D’une pierre deux coups : on fera tourner les usines d’armes et on massacrera plein de gens qu’on abomine en Afghanistan, en Irak, en Syrie, au Yémen, en Libye, etc. Pourquoi un "accord de normalisation" entre les Émirats et l’entité sioniste (août 2020) ? « Il s'agit de permettre aux fabricants d'armes d'élargir leur clientèle. En marge de l'accord tripartite entre Israël, les EAU et les États-Unis, ces deux derniers pays ont conclu un accord en vertu duquel les États-Unis vendront des avions de chasse F-35 américains de cinquième génération à l'État du Golfe à un prix minimum de 77,9 millions de dollars l’unité ». (4)
Les Etats-Unis mènent une politique impérialiste
au profit de l’industrie de l’armement, des compagnies pétrolières et grandes
banques… Considérés partout dans le
monde comme un grand pays terroriste, ils ont perpétré plus
d’offensives militaires que n’importe quel autre Etat de la planète. Les
présidents successifs ont tous été ouvertement pour une suprématie étasunienne
inexorable sur le monde. Ils ont tous été en faveur du droit d'intervention
avec pertes et fracas, de l’établissement de centaines de bases militaires
dans tous les coins. Statistiquement, il y a assurément plus de risques d’être
attaqué un jour par ce pays que par la Russie, la Chine ou l’Iran. Les
Etasuniens sont fiers de leur NASA et ses missions spectaculaires, mais cela ne
peut occulter les atrocités commises. La véritable prouesse pour l’humanité serait
de cesser les complots criminels et les bombardements sauvages, d’insuffler un
peu d’humilité à ces fanfarons militaires qui croient qu’ils ont le droit de
faire partout ce qu’ils veulent, à qui ils veulent, aussi longtemps qu’ils le
veulent…
L. Vanoost est fondé à écrire que les Etats-Unis sont
« un pays réactionnaire saturé de fanatiques ignares ». C’est
le pays par excellence où les élections sont privatisées de facto, où les candidats
se retrouvent littéralement soumis aux électeurs sionistes (juifs et
évangélistes). Un candidat pourvu d’une expérience d’à peine deux ans au niveau
national peut malgré cela devenir président. Ce qui rappelle la réflexion de C.
Sheehan : « Il était une fois, dans l’Empire du Mal, un homme
extrêmement stupide et méchant appelé G.W. Bush qui fût élevé au rang de
dirigeant suprême du pays. Il avait été un étudiant plus que médiocre et avait
échoué dans toutes ses tentatives de gestion d’entreprises et se révéla un
désastre sans nom au poste de gouverneur d’une des provinces lointaines de
l’Empire appelée le Texas… ». (5) En 2008, après ce règne
funeste, l’Empire a trouvé son sauveur : Barack Obama… et subitement le
souvenir des extravagances et malheurs des dernières huit années s’est effacé
des mémoires, bien que les séquelles aient été toujours visibles.
L’arme de la dette permet de conquérir et d’asservir nombre de nations. Le FMI, dominé par le département du Trésor des États-Unis, s’adonne au racket des pays pauvres, fabrique la misère. Il nuit manifestement à l’Afrique. Là, quand ce n’est pas l’ambassade américaine, c’est cette institution malveillante qui décide… John Perkins, un économiste repenti, explique comment, pour le compte des Etats-Unis, il était amené à escroquer des pays en leur prêtant plus d'argent qu'ils ne pouvaient rembourser. Étouffés par un système trafiqué, ces pays ne pouvaient plus offrir de résistance au pillage des multinationales US. (6) On comprend qu’il soit vital d’empêcher l’Afrique de s’unir, de s’émanciper, de se défaire des rapports de subordination.
Dans le monde arabe, le phénomène de
phagocytage et l’influence destructrice des Etats-Unis sont sans précédent. Pour
Washington, l’Arabie Saoudite est une véritable mine d’or et en même temps un
excellent instrument au service de leurs plans guerriers. Les Saoudiens sont
heureux d’apprendre qu’ils battent tous les records d’achats d’armes américaines.
Les contrats de vente très juteux renforcent leurs capacités militaires, leur permettant
d’intervenir au Yémen et de contrecarrer l’action de l’Iran dans la région… Mais,
si le vent tourne, les satrapes mis en place peuvent-ils compter sur
leurs maitres étasuniens ? Au besoin, ils sont destitués sans état d’âme.
Lorsqu’ils sont politiquement discrédités et/ou ne servent pas assez les
intérêts de leurs protecteurs, ils sont remplacés par des marionnettes enrôlées
dans les rangs même de l'opposition. Saddam Hussein, Ben Ali et Moubarak, jadis
maintenus en selle
par les Yankees et soumis
à leurs intérêts, croyaient sincèrement
être traités en amis. Une méprise fatale : l’Empire n’a pas d’amis, il n’a
que des laquais. Hilary Clinton, à la veille de la fuite de Ben Ali, avait prévenu
sur un ton plein de morgue (je cite de
mémoire) : « aucun dirigeant [arabe] ne doit se sentir couvert
par le gouvernement américain ». C’est sans doute ce que n’a pas
compris aujourd’hui l’apprenti sorcier Guaido au Venezuella.
Qui pourra, de bonne foi,
ignorer la nature prédatrice et criminelle des dirigeants de Washington-Paris-Londres ?
Karl Marx disait : « Le Capital a horreur de l’absence de profit.
Quand il flaire un bénéfice raisonnable, le Capital devient hardi. A 20%, il
devient enthousiaste. A 50%, il est téméraire ; à 100%, il foule aux pieds
toutes les lois humaines et à 300%, il ne recule devant aucun crime ».
(7) Les Etats-Unis ont fait le choix répété de trahir les principes
humains les plus élémentaires en privilégiant leurs intérêts économiques et
stratégiques. Lorsqu’ils ont envahi l’Irak ou l’Afghanistan c’était pour y apporter
"la stabilité" – un terme de leur jargon qui signifie soumission impérieuse
à leur volonté. A l’opposé, si l’Iran essaye d’accroître son influence dans son
voisinage, son action est "déstabilisante". « Cette doctrine,
comme tant d’autres, est élaborée dans les universités. Un commentateur
libéral, James Chase, a même pu dire sans crainte du ridicule que les
Etats-Unis devaient déstabiliser le Chili d’Allende pour apporter la stabilité
– c’est-à-dire la soumission aux Etats-Unis ». (8) Nous
avons d’innombrables exemples obscènes de la perte de contrôle moral de ce
pays. S. McChrystal, ex Commandant des forces armées étasuniennes en
Afghanistan a un jour fait cet aveu (étant certain de l’impunité absolue) :
« Nous avons tiré sur un nombre considérable de personnes et en avons
tué beaucoup, et pour autant que je sache, aucune de ces victimes ne
représentait une menace établie pour nos forces ». (9)
La cheville ouvrière des conspirations, coups d’État et tentatives de putsch en Amérique latine est toujours l’ambassadeur étasunien. Plusieurs pays ont dû subir des tentatives de coups d’État : la Bolivie en 2008, le Honduras en 2009, l’Équateur en 2010, le Venezuela en 2002, 2019 et 2020. En Bolivie, victime de tant de putschs militaires, Evo Morales a un jour été prévenu par un compatriote : « Président Evo, vous devez vous méfier de l’ambassade des Etats-Unis. Il y a toujours eu des coups d’État en Amérique latine. Le seul endroit où il n’y a pas eu de coups d’État, c’est aux Etats-Unis, parce qu’il n’y a pas d’ambassade étasunienne ». (10)
Malgré tous leurs méfaits, les Etasuniens veulent croire
qu’ils personnifient le Bien. Dans leurs manuels scolaires, ils ne se gênent
pas le moins du monde de le souligner : « Les Etats-Unis ont été une sorte d’Armée du Salut pour le reste du
monde : tout au long de l’histoire, ce pays n’a fait qu’aider les pays
pauvres, ignorants et malades... Les Etats-Unis ont toujours agi avec
désintéressement, toujours au nom de grands principes ; ils ont toujours
donné et jamais pris ». (11) A
cette idée de la bienfaisance sui generis,
Barak Obama avait, en 2011, concocté un récit amusant : « Un de nos avions a eu des ratés en survolant
la Libye. Or, quand un de nos aviateurs a sauté en parachute, dans un pays dont
le dirigeant a si souvent satanisé les Etats-Unis, dans une région qui a eu des
relations si difficiles avec notre pays, cet Etasunien n’a pas rencontré
d’ennemis, au contraire, il a été accueilli par les gens à bras ouverts ». (12)
Les officiels étasuniens peuvent-ils raisonnablement
croire ce qu’ils racontent ? Ils semblent plutôt avoir une croyance
illimitée en la jobardise de leurs concitoyens. En mars 1953 déjà, le Président
Eisenhower s’interrogeait innocemment : « Pourquoi ne réussissons-nous
pas à nous faire aimer dans ces bleds perdus au lieu de nous faire haïr ? ».
(13) Près de soixante-dix ans après, cette question
énigmatique est plus que jamais d’actualité… Les atrocités et injustices
infligées aux nations du monde, dans le passé et le présent, sont incommensurables. Un problème que W. Blum a formulé avec
force : « Si j’étais président, je
présenterais mes excuses à toutes les veuves, aux orphelins, aux personnes
torturées, à celles tombées dans la misère, aux millions d’autres victimes de
l’impérialisme américain. Ensuite, j’annoncerais aux quatre coins du monde que
les interventions américaines dans le monde sont définitivement terminées, et
j’informerais Israël qu’il n’est plus le 51e État des États-Unis mais dorénavant
– chose curieuse à dire – un pays étranger. Et puis, je réduirais le budget
militaire d’au moins 90 %, utilisant le surplus à payer des réparations
aux victimes… Voilà ce que je ferais les trois premiers jours. Le quatrième
jour, je serais assassiné ». (14)
Thami BOUHMOUCH
Novembre 2020
____________________________________
(1) Noam Chomsky, La sauvagerie de l’impérialisme états-unien, Le
grand soir, décembre 2010. https://www.legrandsoir.info/Chomsky-la-sauvagerie-de-l-imperialisme-etats-unien.html
(2) Cf. Le Monde du
29 avril 2019, https://www.lemonde.fr/international/article/2019/04/29/les-depenses-mondiales-d-armement-approchent-des-2-000-milliards-de-dollars_5456047_3210.html
(3) Cf. Les
Echos du 9 mars 2020, https://www.lesechos.fr/industrie-services/air-defense/les-ventes-darmes-augmentent-encore-dans-le-monde-1183166
(4) Sahar Vardi,
Les vrais
gagnants de l'accord israélo-américain ? Les marchands d'armes. ISM France,
octobre 2020. http://www.ism-france.org/analyses/Les-vrais-gagnants-de-l-accord-israelo-americain-Les-marchands-d-armes-article-21256
(5) Cindy Sheehan, Il
était une fois dans l’Empire du Mal, février 2011. http://www.legrandsoir.info/Il-etait-une-fois-dans-l-Empire-du-Mal.html
(6) Cf. J.Perkins, Confessions d'un assassin financier. http://www.dailymotion.com/video/xe9n2b_confessions-d-un-assassin-financier_news
(7) Voir Le
Prisme, Représenter le Capital. https://www.le-prisme.fr/2017/10/l-31-representer-le-capital.html
(8) Noam Chomsky, La
sauvagerie de l’impérialisme états-unien, op. cit.
(9) Cité in : Il est temps de voir les États-Unis tels qu’ils sont, Le grand soir, 3 décembre 2016. https://www.legrandsoir.info/il-est-temps-de-voir-les-etats-unis-tels-qu-ils-sont-daily-beast.html
(10) Fidel Castro, Le discours d’Evo, 24 novembre 2010 http://www.fidelcastro.cu/fr/articulos/le-discours-devo
(11) Cité par William
Blum, Mediapart, 3 juillet 2018. https://blogs.mediapart.fr/pizzicalaluna/blog/030718/amerique-latine-pizzi-pourquoi-fuient-ils-par-william-blum
(12) Cité par Fidel Castro, Réflexions, 31 mars
2011. http://www.cuba.cu/gobierno/reflexiones/2011/fra/f310311f.html
(13) Cité in : Imperial hubris, 21 août 2011. http://bouhmouch.blogspot.com/2011/08/imperial-hubris-12-une-derive-morale.html
(14) William Blum, L’Etat
voyou, 3 juillet 2011. http://www.legrandsoir.info/l-etat-voyou.html
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire