Le marché, plus qu'hier, est un champ
de bataille où les coups les plus imprévisibles, les plus déroutants sont
permis. Partout, la concurrence se fait plus vive. L'entreprise qui ne se
cramponne pas à sa position, qui ne va pas de l’avant, s'aperçoit rapidement
qu'elle se met à reculer.
Au Maroc, les dirigeants de Procter & Gamble ont en mémoire l’année 2002 où la marque Tide est descendue, pour la première fois de son histoire, en dessous de 50 % de part de marché. L’arrivée d’autres marques de détergent a érodé rapidement la position du géant. Le fait est révélateur : l’opérateur américain avait fini par adopter un important programme de restructuration qui avait mené à une série de licenciements.
Et le cas Centrale Laitière ? Auparavant, elle jouissait d’une situation de quasi-monopole sur les produits laitiers, fournissait peu d’efforts en termes d’innovation et de prix. Lorsque de nouveaux acteurs ont commencé à pénétrer le marché et faire baisser sa part de marché, l'entreprise s’est décidée à réagir. La société Copag, notamment, n’inquiétait personne tant qu’elle se cantonnait à la région de Taroudant. Les choses ont changé en 1997, lorsqu’elle a décidé d’étendre son champ d’action aux villes situées plus au nord du pays.
Au Maroc, les dirigeants de Procter & Gamble ont en mémoire l’année 2002 où la marque Tide est descendue, pour la première fois de son histoire, en dessous de 50 % de part de marché. L’arrivée d’autres marques de détergent a érodé rapidement la position du géant. Le fait est révélateur : l’opérateur américain avait fini par adopter un important programme de restructuration qui avait mené à une série de licenciements.
Et le cas Centrale Laitière ? Auparavant, elle jouissait d’une situation de quasi-monopole sur les produits laitiers, fournissait peu d’efforts en termes d’innovation et de prix. Lorsque de nouveaux acteurs ont commencé à pénétrer le marché et faire baisser sa part de marché, l'entreprise s’est décidée à réagir. La société Copag, notamment, n’inquiétait personne tant qu’elle se cantonnait à la région de Taroudant. Les choses ont changé en 1997, lorsqu’elle a décidé d’étendre son champ d’action aux villes situées plus au nord du pays.
On gagne si on propose mieux
La compétition est l'état normal vers lequel tend
le monde des affaires. Sur le marché du ciment, pendant longtemps, les acteurs
majeurs ne se livraient pratiquement à aucune concurrence. Chacun d'eux
couvrait une zone géographique distincte : Holcim
dans l'Est et le Nord-est du pays, Ciments
du Maroc au Sud, Lafarge dans le
Nord et le Centre. Cette entente tacite était due notamment au fait qu’au-delà
d’un certain rayon (vu les coûts de transport) la compétitivité est compromise.
Dès 2005, cette situation a changé : alors que Lafarge a affirmé sa présence
dans l'oriental, Holcim a investi
dans une unité à Settat pour se rapprocher du marché casablancais. Le second
groupe lorgnait même du côté de Marrakech où les projets touristiques
poussaient comme des champignons. Qui plus est, les accords de libre-échange
étaient de nature à attiser la concurrence. Les cimentiers en étaient pleinement
conscients.
Le contexte actuel est caractérisé par une offre
pléthorique et un large éventail de produits. Il est caractérisé – corollaire
obligé – par le libre choix exercé par le consommateur, des rivalités entre les
marques et des barrières élevées à l'entrée. Le Maroc est irréversiblement
engagé (qu’on le veuille ou non) dans l'ouverture de son commerce extérieur.
Depuis 1993, bon nombre de produits ont connu des baisses douanières
successives. Quelle chance a-t-on de pouvoir échapper au maelström des
contraintes imposées par la compétition à l'échelle mondiale ? Un
professionnel, il y a dix ans, l'a bien fait remarquer : « l'approche du marché aujourd'hui est différente de celle d'il y a dix
ans où mon concurrent habitait la même ville, la même région ou le même pays.
Maintenant, il est dans le monde ». (1)
On ne le répétera jamais trop : l'instantanéité des échanges et l'hyper compétition imposent un management foncièrement réactif et efficient. Des produits étrangers souvent de meilleure qualité et plus compétitifs pénètrent continuellement le marché national. « On gagne si on propose mieux, différent, plus intéressant, plus utile. Rien ne sert d'être bon : il faut être meilleur. Mieux vaut être médiocre face à de mauvais concurrents que bon face à d'excellentes entreprises. Le système veut aussi que si les autres sont moins bons, ils doivent à terme disparaître ». (3) Le défi est lancé, il faut pouvoir y répondre.
Un dilemme s’est fait jour. D’un côté, on conçoit
que le jeu de la libre concurrence soit avantageux pour le consommateur final :
il s’informe, choisit le point de vente, compare les prix, opte pour la marque
qui lui convient… bref il a plus de pouvoir. De l’autre, on craint qu’une
ouverture totale des frontières puisse faire disparaître des pans entiers du
tissu industriel national (c'est ce que les darwinistes appellent une sélection
naturelle). La déconfiture des PME, en effet, signifie inévitablement la perte
de plusieurs milliers d'emplois – ce qui porterait atteinte à la demande.
L’époque n’est pas si lointaine où la
CGEM militait pour un ralentissement du démantèlement,
soutenait l'idée qu'il « faut
laisser le temps au temps ».
Comprendre la dynamique
concurrentielle
L'Etat est-il à même encore de jouer le rôle de
pompier ? Les débats sur l'Etat régulateur ont fait leur temps. Chacun a
fini par comprendre que la révision de la parité de la monnaie locale (réclamée
jadis par les professionnels du textile) n'est pas la panacée. La protection monétaire
s’est révélée une idée piège : elle n'est pas pour inciter les opérateurs
à moderniser leurs infrastructures et à adapter leurs produits aux exigences du
marché. Désormais, les patrons savent bien qu'ils n'ont d'autres choix que de
s'intégrer dans les circuits internationaux, de croiser le fer avec les autres.
La meilleure façon de gérer le processus de mondialisation serait d'en limiter
les effets pervers. Comment répondre au désordre du changement ? En renonçant aux vieilles certitudes, en acceptant
de se remettre en question.
Sur un territoire encombré, le consommateur se
montre plus exigeant sur la qualité ; il est l'arbitre final du jeu
concurrentiel. On se rend compte qu’il n'y a pas de client dévoué définitivement
à une marque. Tout client est par nature « zappeur ». Rien ne
l’empêche de s’évader vers le concurrent, de favoriser une meilleure offre. Résultat :
l'entreprise se bat pour conserver sa part de marché. Elle s’efforce pour cela de
tout mettre en œuvre pour fidéliser sa clientèle. Car la conquête de
nouveaux clients se révèle difficile et coûteuse. C’est la conservation des
clients qui figure au premier rang des préoccupations. Mais ce
n’est nullement une sinécure : « la fidélisation est un combat de tous les jours pour
lequel il faut en permanence s’adapter à l’environnement de votre entreprise et
du marché ». (4)
Si elle est tangible, elle donne lieu bel et bien à un avantage concurrentiel.
Avantage concurrentiel : voilà le maître-mot. Son principe général et son enjeu stratégique coulent de source : les entreprises progressent les unes au détriment des autres. Elles n'auront pas toutes la faveur du public. Sur un marché où les concurrents sont (eux aussi) présents et actifs, il faut constamment chercher à faire les choses mieux et plus rapidement. Il se trouvera toujours un «meilleur disant» en termes de prix et de qualité. Il s'agit de satisfaire le consommateur mieux que ne pourrait le faire l’adversaire… Cela dit, un leader ne le reste que par le maintien de son avance. L’avantage implique donc obligatoirement une action offensive ou défensive afin de faire face constamment aux forces rivales. Toute position acquise est censée être défendable.
Avantage concurrentiel : voilà le maître-mot. Son principe général et son enjeu stratégique coulent de source : les entreprises progressent les unes au détriment des autres. Elles n'auront pas toutes la faveur du public. Sur un marché où les concurrents sont (eux aussi) présents et actifs, il faut constamment chercher à faire les choses mieux et plus rapidement. Il se trouvera toujours un «meilleur disant» en termes de prix et de qualité. Il s'agit de satisfaire le consommateur mieux que ne pourrait le faire l’adversaire… Cela dit, un leader ne le reste que par le maintien de son avance. L’avantage implique donc obligatoirement une action offensive ou défensive afin de faire face constamment aux forces rivales. Toute position acquise est censée être défendable.
C’est ici le point
majeur : comprendre la dynamique
concurrentielle est une composante essentielle de l'analyse stratégique. On
sait que le plan marketing indique concrètement les objectifs à atteindre, les moyens à mettre en
œuvre, les opérations à mener et les échéances correspondantes. Ce que l’on
sait peut-être moins, c’est qu’il suppose une anticipation des actions des concurrents et une
évaluation des avantages concurrentiels acquis. Il est conçu en tenant
compte à la fois des buts/moyens de l'entreprise et des forces qui agissent sur
le marché. Ainsi, la connaissance de
la concurrence et de son pouvoir compétitif doit figurer en préambule du plan
d’action. Le marché potentiel, c'est-à-dire le marché qu'on peut espérer
conquérir, est d’ailleurs évalué compte tenu des dispositions estimées des
principaux rivaux.
Thami Bouhmouch
Rédigé en mai 2004, remanié en septembre 2011.
_________________________________________________________
(1) A.
Lahjouji, ex-Président de la CGEM ,
in Economie & Entreprises, mars
2000.
(2) On sait que la mondialisation n'est pas un instrument de progrès pour
tous. Elle exclue de facto de larges pans de la population mondiale,
tend à détruire des emplois, des traditions, voire la cohésion des sociétés ;
elle profite surtout aux sociétés nanties... Mais ce n'est pas le lieu d'en
débattre.
(3) J.-P. Pécoul et M.
Santi, Fortune faite. L’expérience des grands créateurs d’entreprises
français du XXè siècle, Dunod 1991, pp. 71-72.
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