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8 décembre 2013

L’ENTREPRISE FACE A L’ACTION DES PUBLICS EXTERNES Médias, groupes de pression et grand public



Série : L’essentiel didactique

« Si nous ne communiquons pas, nous n'existons pas » Un professionnel


L'entreprise est en relation directe avec plusieurs publics. Les publics internes, le public financier et les pouvoirs publics ont été abordés dans les papiers précédents. Il reste maintenant à examiner les médias, les groupes de pression et le grand public.

Les médias
Pourquoi faut-il qu’une entreprise se préoccupe de l’action des médias (presse, télévision, radio) ? Parce que les journalistes sont en mesure de juger son activité, de la présenter sur la place publique d’une manière favorable ou défavorable.  
Inciter les médias à projeter une image positive de l'entreprise et de ses produits suppose que les dirigeants connaissent les journalistes les plus influents, qu'ils entretiennent de bons rapports avec eux. Le média (la presse surtout) peut être utilisé à des fins diverses : promouvoir la marque, mettre en lumière un événement marquant (innovation, fusion, résultats financiers, investissements), faire une mise au point, concourir à une campagne de sensibilisation. L’introduction en Bourse, notons-le, permet d'être présent gratuitement dans un certain nombre de médias, ce qui renforce la notoriété de la marque et a des conséquences favorables sur le plan commercial.
Au Maroc le paysage médiatique a beaucoup évolué avec l’apparition d'une presse indépendante, portée davantage sur son rôle informatif. C’est ce qui a amené le monde professionnel à s’ouvrir résolument à la communication média. En fait, l'intérêt pour les médias varie en fonction des objectifs de l'entreprise et la nature de son activité, selon qu'il s'agit d'une multinationale, d'un grand groupe, d'une société cotée ou d'une PME. Cette dernière communique peu ou recourt à des actions sporadiques pour diverses raisons : méconnaissance des enjeux, peur de la transparence, ressources limitées (les prestations des agences de communication coûtent cher)… En revanche, dans les entreprises structurées la communication est plus méthodique, s'inscrit dans un processus continu, une optique de long terme.
Le journaliste est perçu comme une courroie de transmission de l’information aux différents publics. On cherche à établir avec lui une relation de confiance, d’estime et d’adhésion. Les relations presse sont de plus en plus intégrées dans la stratégie de communication. Avec les relations publiques, elles constituent un couple indissociable qu’il importe de gérer de façon judicieuse. D'où l’apparition dans les organigrammes de services appelés « Communication Externe » (BMCI), « Communication Globale » (RAM), « Relations Publiques » (Meditel), etc. Le responsable communication attaché de presse, dont le rôle s’affirme, a pour mission de  « promouvoir l'entreprise pour laquelle il travaille auprès des médias, créer ou parfaire son image, assurer une large diffusion des messages à moindre coût, contrecarrer les rumeurs »… (1) Encore faut-il que la relation soit bien gérée, que l'interlocuteur désigné soit compétent et les messages cohérents.
La communication média revêt diverses formes : conférence de presse, communiqué de presse, dossier de presse, publi-rédactionnel, reportage télévisé...
La conférence de presse permet de diffuser l’information verbalement et de bénéficier d’une bonne reprise par les médias. C’est l’occasion d’annoncer un événement, de présenter un bilan, de révéler une personnalité… Le communiqué de presse est un texte court transmis aux médias, portant sur un changement important, un nouveau produit, le lancement d’un site web, etc. « Si on sait bien s’y prendre, un communiqué de presse peut entraîner une avalanche de publicités gratuites pour votre activité ». (2)  
Le dossier de presse regroupe un ensemble de documents destinés à fournir aux journalistes des contenus rédactionnels concernant l’entreprise, sa marque, ses produits ou son action marketing. « Il se différencie du communiqué car il développe et élargit davantage l’information ; il est plus lourd et plus coûteux que le communiqué ». Le publi-reportage enfin est un texte à but publicitaire se présentant comme un contenu éditorial que l'entreprise prend l’initiative de publier dans la presse écrite ou sur internet. Telle société, par exemple, publie dans une revue une simulation d’interview de son PDG, permettant d’expliquer sa position sur le marché, les avantages qu'elle offre à ses clients, ses projets et objectifs.

Pour communiquer avec les médias, d’autres moyens sont possibles. Il en est ainsi de Lydec (Casablanca) qui s’efforce de répondre aux sollicitations des journalistes en programmant des visites de sites et des rencontres directes avec le personnel, (3) de la RAM qui octroie des avantages sur ses vols (billets, réductions) aux journalistes de son choix…
Il est clair que les médias, en transmettant des informations sur les produits de l'entreprise, peuvent valoriser celle-ci, assurer sa notoriété, contribuer à la réalisation de ses objectifs commerciaux. Tel journaliste écrit, à propos de Colgate, que « la marque a beaucoup innové pour donner à vos dents un grand éclat de santé ». On imagine l'impact sur le public-cible d’une telle proposition. L'effet Meditel n'aurait pu avoir l’ampleur qu’il a eue sans les médias. Microsoft y recourt aussi pour sensibiliser le grand public aux méfaits du piratage informatique.
En France, une étude a été menée (1.156 personnes interrogées) afin de mesurer l'influence de la presse écrite sur les comportements d'achat : « 69 % des Français estiment que les articles de presse leur permettent de mieux choisir, 81 % découvrent de nouveaux produits grâce à la presse et 65 % confortent leurs décisions d'achat après la lecture d'un article ». (4) L’étude montre que le consommateur a besoin de s’en remettre aux journalistes pour avoir un avis averti sur une marque ou un produit, que son comportement d'achat est directement influencé par ce qu’il lit dans la presse.
Alors que dans la communication publicitaire il s’agit de développer un argumentaire commercial pour vendre, les relations presse sont au service de la communication institutionnelle (relayée par les journalistes). Celles-ci contribuent à informer le public sur l’activité de l’organisation, ses marques, son rôle socioéconomique, ses moyens de production… Les relations presse bénéficient d’une grande crédibilité : « Une étude récente a démontré que le message institutionnel a 6 fois plus de valeur que le message publicitaire en termes de perception, de mémorisation et d'acceptation ». (5)
A l'opposé, il n'y a rien de plus dangereux qu'une information négative. En été 1999, l’article de presse « un cafard dans le Coca » avait fait sensation. Et en avril 2013, une rumeur  colportée par la chaîne de télévision BFM (France) au sujet de la présence de porc fermenté dans le coca-cola a provoqué un tollé sur le web. Dans les deux cas, les dirigeants de la firme ont été obligés de réagir… Lorsqu’un journaliste porte un jugement dépréciatif sur une entreprise, il porte atteinte à son image et au comportement de son titre en Bourse. 

Groupes de pression et grand public 
Les groupes de pression (lobbys) sont des groupes d'individus qui agissent, avec des objectifs bien définis, afin de faire triompher leurs aspirations ou revendications. Ils défendent les intérêts de leurs membres en exerçant une influence notable sur les décideurs (parlement et gouvernement). C’est le cas des syndicats, des partis, des associations telles l’AMC (consommateurs), la CGEM (patronat), l’ASMEX (exportateurs), l’AMITH (industries du textile)… Toutes les causes trouvent des défenseurs. Deux en particulier peuvent influer directement sur les entreprises et, delà, sur les décisions marketing : la protection du consommateur (consumérisme) et la sauvegarde de l'environnement (écologie).


Le consumérisme vise à assurer la représentation et la défense des intérêts des consommateurs. Curieusement, le terme est souvent mal compris, comme le montre cette phrase : « Les grandes entreprises sont les premières responsables de la société productiviste et consumériste destructrice des ressources naturelles ». (6) Il y a méprise : le mouvement consumériste renforce les droits du consommateur et oblige le gestionnaire à en tenir compte. C'est grâce au consumérisme que le prix de l'unité de poids, par exemple, a été mis en place dans les grandes surfaces. Il est possible même de déceler des opportunités de développement tacites dans les revendications du mouvement.
Au Maroc, l’AMC (Association Marocaine des Consommateurs, née en 1994) a pour objectifs d’informer et de sensibiliser le consommateur sur ses droits, d’attirer l'attention des fabricants, importateurs et distributeurs sur leurs obligations à son égard. Il s'agit en vérité d'un mouvement élitiste plus que populaire (étant lié au niveau de vie et au degré de scolarité), composé de sympathisants avec peu de moyens. Son rôle n'est du reste pas facile : l'accusation d'un commerçant nécessite un minimum de preuves (les ventes s'effectuent parfois sans facture) et constitue une simple prétention sur le plan juridique. Pour autant, le mouvement est susceptible d'acquérir une certaine crédibilité, devenir une force que les entreprises ne pourront pas ignorer dans les années à venir.
Quant aux mouvements écologistes, ils luttent contre la pollution industrielle et l’épuisement des ressources naturelles. Ils poussent les pouvoirs publics à adopter des règles restrictives concernant les produits toxiques, les déchets industriels et la pollution de l’air. Ils incitent les entreprises à être socialement responsables, à s’engager résolument dans des actions éthiques, favorables à l’environnement.
Que dire en dernier lieu du grand public ? Bien qu’il n’agisse pas de façon organisée, il se comporte sur le marché en fonction de sa perception des produits et de leur fabricant. Le jugement porté sur les marques par le consommateur influe immanquablement sur ses décisions d'achat. Dès lors, il importe de se soucier de l'attitude du grand public vis-à-vis de l'entreprise, de s'employer à améliorer son image de marque. C’est l’objectif poursuivi par les relations publiques. L’enquête qui a été effectuée en 2008 auprès de 100 entreprises marocaines (tous secteurs confondus) portait sur le sujet : 36 % des répondants ont cité les relations publiques parmi leurs principaux outils de communication. (7)
Il n’y a pas longtemps, les dirigeants de l’ONA voulaient savoir comment le groupe était perçu sur la place publique. Une enquête a été réalisée auprès des analystes financiers, des étudiants et de la presse. Les enquêteurs ont été surpris d'apprendre que le groupe « n'est pas très transparent et communique mal », qu’il est perçu comme une entité « néo-makhzenienne ». Une telle image ne saurait bien sûr servir les ambitions internationales de ce mastodonte. (8) Lydec, soucieuse de son image, a lancé dans le passé plusieurs campagnes de communication grand public dans le but de sensibiliser les citoyens aux activités de l'entreprise et à son fonctionnement. Les messages didactiques et sketches diffusés à la télévision, ainsi que les émissions radio ont été axés sur la consommation d'eau et d'électricité, le mode de facturation et d'encaissement, la tarification et la taxe d'assainissement.

Thami BOUHMOUCH
Décembre 2013
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(3) Cf. revue Economie & Entreprises, novembre 2000.
(7) Cf. www.supracom.ma/ (publication : 17/09/08).
(8) Cf. Economie & Entreprises, mai 2001.

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