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30 décembre 2015

LE TABLEAU DE BORD, POUR RÉAGIR EN TEMPS RÉEL


Série : Marketing stratégique  


Le suivi du plan durant l’exécution suppose à la fois le recours à des indicateurs appropriés et un contrôle méthodique de l'avancement des actions sur le terrain. A cet effet, le tableau de bord (TdB), mis en place en concertation avec les principaux responsables, donne à tout moment un aperçu visuel des indicateurs clés. (1) Destiné aux acteurs concernés, ce document permet de confronter les résultats obtenus aux objectifs prévus, de corriger les situations dangereuses, d’éviter ainsi les mauvaises surprises.
Contrôler peut a priori vouloir dire surveiller une action et chercher à la maitriser en vérifiant sa validité après-coup... Qu’en est-il ?

Un contrôle prospectif ou rétrospectif ?
Le tableau de bord, dans sa version « classique », est conçu pour vérifier l’action accomplie et évaluer les écarts avec la ligne tracée… Par exemple, une analyse des chiffres de vente montre que le décollage du nouveau produit est plus lent que prévu. On décide alors de retoucher le plan d’action en renforçant la publicité autour de ce produit. On constate telle anomalie, puis on rectifie. « Cependant, pour mettre en œuvre une stratégie dans un contexte tourmenté, ce n'est pas d'un tableau de bord de constat dont nous avons besoin mais bien d'un tableau de bord de pilotage ». (2)
La différence fondamentale entre ces deux versions réside dans la relation au temps de chacune d’elles et sa position dans la succession ci-après :  
1. Avant/planification ; 2. Pendant/exécution ; 3. Après/vérification.
Le TdB de constat trouve sa place au temps 3, à un moment où il est souvent trop tard pour rectifier le tir. Le TdB de pilotage est utilisé au temps 2, durant l'exécution, lorsqu'il est encore possible de corriger une action ou même de changer de direction.
Il ne suffit pas d’obtenir rapidement l’information concernant un des indicateurs du TdB. Il faut encore pouvoir disposer des données qui permettent de faire des prévisions et donc d’anticiper l’évolution de l’activité de l’entreprise. Le manager a constamment besoin de savoir « où il va ». Il anticipe un problème de trésorerie, une augmentation des charges, le lancement d'une nouvelle activité, le recrutement de nouveaux collaborateurs, etc. « Sans un minimum d’anticipation, la rentabilité de votre entreprise sera aléatoire et vous serez incapable de prendre les bonnes décisions au bon moment et en connaissance de tous les paramètres ». (3)
On convient que le montant des ventes facturées par exemple est une donnée trop tardive. En revanche, le nombre de devis réalisés et celui des devis traduits en commandes fermes sont des données essentielles. Si ce nombre se met à baisser, on décide sans tarder d’agir sur les différents leviers de l’action commerciale. (4) S’il s’avère inversement que le carnet de commandes a dépassé les prévisions, on cherche à anticiper avec le banquier une solution de trésorerie permettant de faire face au supplément de production.
Le TdB nouvelle génération est dès lors un outil proactif – en ce sens qu’il agit sur des faits postérieurs, des évolutions possibles. Il permet de mesurer et de piloter la performance d’une entreprise par la mise en place d’indicateurs d’actions et de résultats. On arrive ainsi à anticiper les réponses aux problèmes, à s’adapter et à décider en temps réel.
On s’aperçoit en fait qu’il n’y a pas un TdB mais plusieurs TdB, selon les niveaux hiérarchiques liés par une relation de causalité (voir figure) : « La Direction générale définit les objectifs de l'entreprise (la cible à atteindre) et les actions pour y parvenir (la stratégie). Ces actions sont regroupées en plans d'actions par métier ou par fonction. […] Chaque responsable de division définit à son tour les actions à mener pour atteindre les objectifs qui lui sont assignés. […] Ainsi, le lien entre chaque niveau de tableau de bord se fait par le couple objectif-action. Les réalisations d'actions définies au niveau N deviennent les objectifs du niveau N-1 ». (5)
Un tel dispositif de tableaux de bord permet à la fois le reporting d’un niveau à l’autre d’une manière ascendante (par les indicateurs de résultat) et le pilotage des actions au sein de l'unité (par les indicateurs d'actions et les indicateurs de résultat). 


Ici, il faut s’empresser de préciser : un système de contrôle n’est pas intrinsèquement prospectif ou rétrospectif. Il ne porte pas en lui-même une propension à constater simplement les faits passés ou à réguler l’action en prévoyant une évolution possible…
De là, les indicateurs sont d’ordinaire classés en 3 catégories – en relation avec le type d'information transmise et les attentes du décideur. L’indicateur « Alerte » signale un état anormal du système nécessitant une action plus ou moins immédiate (le franchissement d’un seuil critique entre dans cette catégorie). L’indicateur « Equilibration », un peu comme une boussole, informe sur le déroulement de l’action en relation avec les objectifs fixés. L’indicateur « Anticipation » permet de voir par avance l’évolution des faits et d'envisager les réactions appropriées. (6)
Il reste maintenant à savoir à quel rythme la diffusion de ces indicateurs sera assurée.

Un  contrôle à quelle fréquence ?
A cette question cruciale une réponse abstraite n’est pas possible... Quantité d’explications ont été proposées, ici et là, sans pour cela éviter les équivoques. Sur tel site, on peut lire : « Le tableau de bord [permet de] gérer l’activité au fil de l’eau, quotidiennement ou presque. Tandis que le reporting mensuel constitue un “arrêt sur image” périodique qui aide justement à prendre du recul avec ce quotidien ». (7) Certes, reporting et TdB ne sont pas à confondre (8) et un document disponible au jour le jour constitue l’idéal en tant qu’outil de pilotage, mais il ne faut pas se méprendre : la périodicité ne doit pas être considérée dans l’absolu. La fréquence optimale n’est pas la même d’un projet à l’autre, d’une tâche à l’autre. Tout dépend de la nature et la portée de l’activité considérée.
Si l’impact d’une opération promotionnelle est d’ordinaire assez rapide, il n’en est pas de même d’une action portant sur la distribution, la communication ou la formation du personnel. Dans le premier cas, le suivi gagne à être quotidien ; dans le second, un contrôle une fois par semaine ou peut-être par mois ne sera pas forcément qualifié de simple constat après coup. « Le tableau de bord véhicule en fait des documents très divers, dont le rythme optimal de diffusion varie en fonction de la nature de l’information émise, voire même suivant les destinataires d’une même information ». (9)
Tendanciellement, en effet, une certaine corrélation est perceptible entre les niveaux de responsabilité et les différents horizons de temps. Disons, pour simplifier, que les divers managers disposent de tableaux de pilotage spécifiques et qu’à la limite chaque collaborateur peut disposer d’une sorte de mini tableau lui permettant d'avoir une vision de son activité propre. Le TdB d'un niveau hiérarchique donné inclut une synthèse des TdB du niveau hiérarchique inférieur. Alors que l’employé en charge d’une action s’astreint à des relevés quotidiens, son directeur hiérarchique peut superviser le travail réalisé au rythme d’une fois par semaine ; le directeur général, quant à lui, peut s’en tenir à un suivi mensuel.
Ce schéma n’a bien sûr rien d’absolu… Le propos du patron de la société Stokvis N.-A. (matériel agricole à Bouskoura) en fournit une illustration : « Un tableau de bord arrive tous les matins sur mon ordinateur. Il me dit où nous en sommes par rapport à ce qui a été décidé pour l’année. Quand il y a des problèmes, cela transparaît dans le plan de marche et nous agissons en conséquence ». (10)
C’est cela, tout bien considéré, le véritable enjeu du tableau de bord : permettre à l'entreprise de rectifier le tir pendant le parcours, d’agir au moment adéquat.


Thami BOUHMOUCH
Décembre 2015
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(1) Cf. à ce sujet un article précédent (2011) : Le tableau de bord, outil de pilotage http://bouhmouch.blogspot.com/2011/11/le-tableau-de-bord-outil-de-pilotage.htm
(8) Cf. à ce sujet un article précédent (2011) : Il n’y a pas de planification sans système de contrôle 
   http://bouhmouch.blogspot.com/2011/10/il-ny-pas-de-planification-sans-systeme.html
(10) Revue Essor (Casablanca), avril 2007.



12 décembre 2015

LE CONTRÔLE DU PLAN MARKETING : QUOI, COMMENT ?


Série : Marketing stratégique 


La mise en œuvre  du plan, nous l’avons vu, est suivie et contrôlée en cours de route. Il s’agit d’évaluer les actions individuelles et collectives, de vérifier si les efforts fournis sont dirigés selon la ligne tracée. (1)
Le contrôle porte sur quelles actions, quelles grandeurs ? Quelle est la démarche générale ?

Une démarche en trois temps

Un système de contrôle suppose que l’on soit informé sur les réalisations, que l’on puisse détecter les déviations et ensuite les corriger.

1. L’information est la matière première du contrôle. L'entreprise suit le travail accompli grâce à un dispositif d’information systématique et régulier. Les données chiffrées sont obtenues avant tout auprès des services de la comptabilité ; elles peuvent aussi provenir d’une étude de marché, de panels, de baromètres et autres statistiques.

2. Sur la base de l’information reçue, une détection méthodique des déviations est opérée. On découvre telle contre-performance et on s’efforce de repérer son origine. Les écarts éventuels par rapport au plan sont mis en évidence, mesurés et expliqués.
Il importera de savoir si l’écart détecté est dû à la politique de la concurrence, à tel ou tel attribut du produit, à l’action des vendeurs, au choix du thème publicitaire ou du support… Cela permet à la fois de mesurer la progression vers l’objectif fixé et d’évaluer la qualité du marketing-mix. A cet égard, il y a avantage à intégrer des critères qualitatifs, comme la satisfaction des consommateurs – des critères qui se révèlent particulièrement importants dans les secteurs du tourisme et du transport aérien.
A partir de quel niveau d’écart doit-on considérer qu’il y a déviation ? « On ne s’intéresse à un écart que s’il dépasse la marge de tolérance admise ou si, au cours de plusieurs observations successives, on constate une tendance régulière à se rapprocher de la limite de tolérance »… (2) Et si l’écart était favorable à l'entreprise, peut-on s’en féliciter ? « Bien souvent, un écart favorable est le signe soit d’une erreur dans la fixation des objectifs, soit d’un changement important de la situation qui justifierait une révision des objectifs ». (3)

3. Une fois un écart est détecté et analysé, on se doit d’agir, de pallier les déviations constatées. Des mesures correctives sont appliquées de façon adéquate (rentable) au plan initialement prévu. Il sera nécessaire, en fonction de la dynamique du marché, de modifier les objectifs/normes fixés ou au contraire de renforcer les capacités et moyens mobilisés (objectifs inchangés). 
On pourra par exemple baisser les prix, augmenter le budget publicitaire, différer le retour sur investissement, organiser des stages de formation pour une catégorie de vendeurs… Le plan est ainsi réaménagé et reconduit. Au Maroc, le groupe KFC  prévoyait l'ouverture de 30 restaurants à l'horizon 2011. Mais, affaibli par l'agressivité commerciale de son principal rival (McDo), il a dû rabattre cet objectif à deux reprises.
Attention : on aurait tort de remettre en question la feuille de route à chaque fois qu'un indicateur donne l'alarme. Une position de principe semble prévaloir : plutôt que de revoir hâtivement un objectif à la baisse – ce qui pourrait déconcerter le personnel concerné – il faut accepter de renégocier les moyens permettant de l'atteindre. (4)

Les indicateurs surveillés

L’évaluation du plan annuel, effectuée par la direction générale et les directions fonctionnelles, porte sur l’action marketing en cours et les résultats obtenus (comparaison prévu-réalisé).
Les postes à surveiller sont considérés plus ou moins comme importants en fonction du marché et du projet. Mais les données qui priment immanquablement étant le véritable baromètre de l’activité – sont le montant du chiffre d'affaires et le volume des ventes. Le cas échéant, on procède à une évaluation analytique par produit, par région, par segment ou type de clientèle ; on calcule la part de marché par produit, par segment, par secteur…
Le contrôle porte au surplus sur des actions spécifiques : les campagnes de communication, les actes de promotion, les interventions du service-après-vente (nombre/jour), le traitement des réclamations, la pénétration de la marque, le taux de rebut, le baromètre de clientèle, etc.


Bien entendu, la mise en œuvre du plan exige des dépenses et la vente est soumise à des impératifs de rentabilité ; d’où une analyse financière précise des comptes de résultat. Il faut contrôler les coûts et s’assurer du respect des allocations budgétaires. Il s’agit de mesurer l’efficacité des dépenses de marketing, de s’assurer de la réalisation des objectifs de profit. A partir des données comptables, l’évaluation porte ainsi sur les dépenses effectuées, la marge pratiquée, le résultat d'exploitation. Pour mesurer l’effort de marketing, divers indicateurs rapportés au chiffre d’affaires sont calculés : dépenses publicitaires/CA, frais de distribution/CA, etc. Pour mesurer l’efficacité commerciale, on évalue par exemple le ratio profits/dépenses de marketing…
Les différents coûts sont imputés à chacun des produits, secteurs ou types de clientèles auxquels ils correspondent (la ventilation est loin d’être facile). De là, on pourrait reconsidérer le niveau de telle dépense, estimer le risque financier de tel domaine d’activité, mesurer la profitabilité de tel produit, de tel segment de clients, de tel secteur géographique… Le contrôle porte en fait sur l'efficacité des moyens mis en œuvre. Il s’agit de savoir si l'entreprise gagne ou perd de l’argent.

En définitive, le tout n’est pas de vérifier si l’action est en accord avec le plan. Encore faut-il que celui-ci soit pertinent et judicieux. Ce qui veut dire que « le contrôle stratégique doit s'occuper de la performance de l'organisation, pas de la performance de la planification ». (5)

Les indicateurs à contrôler sont autant de clignotants regroupés sur un seul support : le tableau de bord – objet du prochain papier.


Thami BOUHMOUCH
Décembre 2015
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(1) Cf. à ce sujet l’article précédent : Pourquoi contrôler le plan marketing ? http://bouhmouch.blogspot.com/2015/12/pourquoi-controler-le-plan-marketing.html
(2) J. Lendrevie et D. Lindon, Mercator, éd. Dalloz.
(3) Ibid.
(4) Cf. Omar Benaini, consultant à LMS, cité in La Vie éco du 29/07/2005.
(4) Henry Mintzberg, Grandeur et décadence de la planification stratégique, éd. Dunod.

4 décembre 2015

POURQUOI CONTROLER LE PLAN MARKETING ?


Série : Marketing stratégique 



Tout plan se heurte en cours de route à des difficultés d’application. La planification est nécessairement accompagnée d’un suivi et d’une évaluation réguliers. Le manager est amené à vérifier sans relâche la corrélation entre le prévisionnel et la réalité vécue ; il est tenu de réagir aux imprévus. Si nécessaire, le plan marketing lui-même est ajusté en cours d’année afin de mieux coller aux conditions du marché.
C’est pourquoi il importe de disposer d’un ensemble de moyens de contrôle, de procédés d’observation et de mesure… (1) Quels en sont les principes ? Quelle en est la nécessité ?

Nécessité du suivi et du contrôle

Notons d’emblée que la planification est conçue en fonction d’une situation particulière (sous ses aspects interne et externe), appréhendée à un moment donné. Or pratiquer la gestion stratégique, c’est s’efforcer de maîtriser un processus dynamique et un terrain en mouvement. Le marché en effet est inconstant, rien n'est jamais immobile ; de nouvelles données tendent à bouleverser le cours des événements prévus. Si certains environnements évoluent lentement et de façon prévisible, d'autres sont caractérisés par des turbulences difficiles à prévoir.
D’un autre côté, il est banal de dire que le marketing et plus largement la gestion d'une entreprise ne sont pas des sciences exactes. La fixation des objectifs et l’élaboration d’une stratégie sont fondées sur des hypothèses que la réalité peut infirmer. Les objectifs ne sont pas figés ; on peut bel et bien ne pas les atteindre, ne pas être dans les délais.
Le plan marketing, en conséquence, n’est pas un ordre de marche rigide. Il est obligatoirement mis à l'épreuve du terrain. Il y a lieu de réagir positivement aux difficultés qui peuvent contrarier les choix adoptés – des difficultés dues par exemple au lancement d’un produit par un concurrent, à des commandes annulées, à un changement de comportement client, à une grève, etc.

On retrouve ici la règle fondamentale : « Il n’y a pas de planification sans système de contrôle ». La planification en somme n’a de sens que si elle est accompagnée d’un suivi et d’une évaluation. Cela permet, outre l’adaptation aux contraintes qui peuvent surgir, de repérer de nouvelles tendances et opportunités. On se doit de s'assurer que chacun joue correctement son rôle, de mesurer le degré de conformité du travail effectué par rapport à la ligne tracée. Qui plus est, les opérations à engager coûtent cher et il y a un budget à respecter.
A cet égard, l’adhésion franche et explicite au plan est une nécessité absolue. Le manager est censé savoir le « vendre » à ses collaborateurs. Plus tard, il se servira des objectifs établis comme des étalons de mesure des résultats obtenus. (2)

La planification est adaptative

Comme aucun secteur n'est à l'abri d'un retournement de tendance, la planification ne saurait être rigide. Elle est nécessairement réactive, adaptative et flexible. (3) Durant la période d’exécution, le plan marketing n’est nullement immuable, ni irréversible. Au contraire, il doit être mis à jour régulièrement, voire remis en question si des changements internes ou externes l'exigent. Lorsque des perturbations ont été constatées ou lorsque les actions accomplies ne sont pas efficaces, des corrections sont apportées, des réajustements sont effectués.
En fait, la planification est à la fois réactive et anticipative. Il faut se préparer, par avance et au mieux, pour se préserver des déviations inopportunes, prévoir des procédures de révision de nature à adapter à temps la ligne choisie aux mouvements possibles du marché. Le plan marketing indique les indicateurs clés de performances (indicateurs de résultats) tout en précisant le mode de suivi et les actions correctrices éventuelles. L'évaluation a posteriori constitue la pièce maîtresse d'un contrôle rigoureux ; mais, cela n'exclut pas un contrôle a priori, au moyen de modèles permettant d'envisager les résultats d'une action avant que celle-ci ne soit mise en œuvre.

Quand doit-on contrôler ? La mise en œuvre d’une stratégie est contrôlée et les résultats évalués en cours de route, tout au long de l’année d’exécution du plan. Le contrôle ne peut être occasionnel ; il est effectué périodiquement. Ici et là, les responsables de domaines d’activité (chefs de division ou chefs d’équipes) procèdent à un contrôle toutes les semaines ou tous les mois ou à la fin de chaque cycle de commercialisation… Il n’y a pas de règle régissant la périodicité. Grâce à l’outil informatique, le suivi peut être permanent.

En définitive, le contrôle marketing apparaît comme un prolongement naturel de la planification. Il suppose à n’en pas douter que les objectifs ainsi que le mode de suivi et d'évaluation de l’action accomplie aient été clairement spécifiés, quantitativement définis (communiqués par écrit). Il faut encore que le prévisionnel tienne compte des conditions et possibilités réelles de réalisation afin de ne pas démotiver le personnel impliqué.

Thami BOUHMOUCH
Décembre 2015
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(1) Cf. à ce sujet un article précédent (octobre 2011) : « Il n’y a pas de planification sans système de contrôle » http://bouhmouch.blogspot.com/2011/10/il-ny-pas-de-planification-sans-systeme.html   
(2) Sur ce point, cf. un article précédent : « Les objectifs sont communiqués au personnel »  http://bouhmouch.blogspot.com/2015/10/les-objectifs-sont-communiques-au.html
(3) Voir à ce sujet l’article « Il n’y a pas de planification sans système contrôle », op. cit.

24 novembre 2015

ÉTABLIR LE PLAN MARKETING


Série : Marketing stratégique 


La stratégie, nous l’avons vu, se traduit par un plan suivant lequel une organisation espère atteindre ses objectifs. (1) C’est un document écrit qui précise, pour une période déterminée, la politique commerciale d’ensemble. Le plan annuel ou plan d’action commerciale – inscrit dans un plan à moyen terme (ou plan à trois ans) – détaille les programmes pour une durée d’un an.

Comment le plan marketing est-il rédigé, quel est son contenu ? 
Il se révèle qu’il n’y a pas de norme stricto sensu, ni de modèle idéal de plan. Chaque entreprise élabore son plan à sa manière avec un contenu et une structure propres. Pour autant, selon une tradition établie, la plupart des plans comportent à peu près les mêmes rubriques. Ils indiquent en règle générale le contexte du marché, les chiffres d'activité à atteindre, la stratégie adoptée, le détail des opérations à mener, les ressources et moyens matériels à mettre en œuvre, la désignation des responsables concernés, les échéances correspondantes, les prévisions financières et le système de contrôle. Ces éléments sont tous indispensables.

Le plan marketing comprend donc, sous une forme ou une autre, les 7 rubriques suivantes :

1. Résumé représentatif du plan  
Ce sommaire (business summary) d'environ deux pages fournit à la direction générale une vue globale des choix et des résultats souhaités. Il synthétise les grandes lignes du projet commercial de l'entreprise : l’état du marché et les faits majeurs, les objectifs visés (CA, PM, volume de clientèle), les orientations stratégiques retenues, les principaux programmes et recommandations. Un tel préambule doit normalement inciter à une lecture de l’ensemble du plan marketing.

2. Analyse de la situation marketing  
Elle met en avant les éléments essentiels d’appréciation du milieu dans lequel évolue l'entreprise – éléments qui ont un impact majeur sur la prise de décision et sur les actions à mener. On y trouve des données sur l’environnement immédiat (concurrence, consommateurs, fournisseurs, intermédiaires) et sur l’environnement général (macro-tendances principales).
Cette analyse, d’un autre côté, porte sur le potentiel de l'entreprise : sur ses ressources et ses compétences, comme sur ses moyens d’action (produits, ventes, PM, niveaux des marges, segments de clientèle, axes publicitaires, prix pratiqués…).
La confrontation des résultats de l’audit interne (état des lieux) avec l’appréciation du marché et son environnement donne lieu au diagnostic SWOT : dans une matrice, l'analyse des attraits/atouts dégage les principales opportunités et menaces, forces et faiblesses. On recommandera ainsi de surmonter ses faiblesses, de se protéger des menaces, de maintenir et consolider ses forces, de saisir les opportunités. (2)

3. Les objectifs marketing retenus
Cette rubrique décrit de manière détaillée et quantifiée ce que l’organisation cherche à obtenir comme résultat final, en termes de chiffres d'affaires, de ventes en volume, de part de marché et de profit ou marges.
Les objectifs marketing globaux, qui constituent eux-mêmes des sous-objectifs des buts de rang supérieur, sont déclinés (concrétisés) sur l’année en objectifs spécifiques. Par exemple : « augmenter ses ventes de x % », « maintenir le niveau de rentabilité à y % », « conquérir une part de marché de z % sur le nouveau segment »… Il importe de bien noter le lien nécessaire entre ces chiffres et le diagnostic fondé sur les éléments factuels. Un objectif commercial résulte de l'analyse SWOT ; on ne peut le fixer avant. (3)

4. La stratégie marketing  
Il est question ici des orientations marketing à moyen/long terme qui seront suivies pour atteindre les objectifs définis. Sont spécifiés ainsi les cibles de clientèle visées (segments porteurs), le positionnement de la gamme de produits, la place souhaitée de la marque dans l’esprit du public…
De même, des indications sont fournies concernant les politiques de produit (nom, qualité…), de prix (écrémage ou pénétration), de communication (axes privilégiés, investissements), de distribution (canaux, degré de couverture).

5. Les programmes marketing  
Le plan annuel ou plan d’action commerciale est axé sur le marketing mix retenu. Il y sera question par exemple d’une augmentation donnée des ventes, du développement de nouveaux produits, de mesures de motivation des vendeurs, d’actions auprès des distributeurs…

Pour chaque action, on indiquera ce qui doit être accompli, à quel moment, par qui et avec quels moyens. Sont ainsi précisés les tâches à effectuer suivant un planning (calendrier), les principaux intervenants (personne, équipe ou service), les ressources allouées (matérielles, humaines, financières) et les démarches préconisées.
On formulera de façon détaillée notamment les actions portant sur le produit, les prix, l'image et la notoriété, les actions de vente ou de promotion, la gestion de l'équipe de vente, les actions de prospection et de suivi de la clientèle, les actions de communication à développer, etc.
Au passage, notons que le manque de précision dans le chiffrage des moyens à mettre en œuvre ne facilitera pas le travail des équipes et la réalisation concrète des buts poursuivis.

6. Estimation des budgets et rendements
L’application du mix nécessite des dépenses. Planifier, c’est aussi prévoir les modes de financement. Le plan d’action, sur la base d’une évaluation des coûts afférents à chaque action commerciale, évalue les ressources allouées. On établit donc les budgets nécessaires. Là aussi, il y a une règle : « Il faut avoir les moyens de sa stratégie et la stratégie de ses moyens ».
Outre le coût des programmes, il s’agit aussi d’évaluer les rendements attendus. On établit alors une prévision financière des résultats souhaités, de ce que chacune des opérations doit rapporter. Tous ces calculs sont effectués en concertation avec la direction financière.
Encore une fois faisons attention : un budget insuffisant ou calculé au plus juste peut mettre en échec les décisions précises. De plus, fixer un budget global pour le mix-marketing sans détailler les postes ne permet pas d’allouer les ressources aux actions de manière adéquate.

7. Le système d’évaluation des performances
La planification suppose et prépare le contrôle des opérations. Il est nécessaire de réagir aux imprévus, de vérifier, d'ajuster. Ce système précise le mode de suivi et d'évaluation du travail réalisé et peut même prévoir des plans de contingence… Ce point est l’objet du prochain papier.

Thami BOUHMOUCH
Novembre 2015
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(1) Cf. mon papier La stratégie marketing se traduit par un plan d’action. http://bouhmouch.blogspot.com/2015/11/la-strategie-marketing-se-traduit-par.html
(2) Au sujet des analyses interne et externe, cf. papier précédent : Synthèse SWOT/LCAG : les éléments identifiés sont confrontés. http://bouhmouch.blogspot.com/2015_08_01_archive.html
(3) Cf. mon papier : Un objectif commercial doit être opérationnel. http://bouhmouch.blogspot.com/2015/09/un-objectif-commercial-doit-etre.html

17 novembre 2015

LA STRATÉGIE MARKETING SE TRADUIT PAR UN PLAN D’ACTION


Série : Marketing stratégique 

  « Les plans importent peu : c’est le processus de planification qui compte » 
D. D. Eisenhower.



Une fois les objectifs définis (où l’on veut parvenir), la stratégie élaborée, les marchés cibles précisés et le positionnement adopté (comment y parvenir), il convient de choisir les moyens d’action les mieux adaptés…
La stratégie identifie la route à parcourir pour atteindre les objectifs mais ne nous permet pas d’agir. Car, pour chaque décision retenue, il faut apporter des réponses à des questions fondamentales : quelle action spécifique est envisagée ? Qui en aura la charge ? Quand sera-t-elle mise en œuvre ? Avec quels moyens ? Combien cela coûtera-t-il ?
Décrire d’une manière précise les tâches et moyens qui concrétiseront la stratégie retenue : tel est le but du plan d’action commerciale (PAC).

Pas d'action sans plan de marketing

Une fois donc la stratégie élaborée, il faut la traduire sous forme de plan d'action. Par exemple, si l'on a décidé d’accéder à la position de leader sur le marché, il faudrait concevoir des produits performants, dynamiser la force de vente et le réseau de distribution, mettre en œuvre un programme de communication adapté…
Une stratégie doit être mise à exécution ; elle n'a de sens que si elle est appliquée concrètement. Sans un plan d'action détaillé, elle reste relativement abstraite et les objectifs ne seront pas atteints. La règle est connue : « pas d'action sans plan de marketing ».

Le plan est conçu en tenant compte à la fois de la connaissance du marché et du potentiel de l'entreprise (analyses externe et interne). Le marketing, il convient de le rappeler, est un système de pensée et un système d’action. L'élaboration d’une stratégie conduit du général au particulier : nous passons d’une phase stratégique à une phase opérationnelle ; d’une orientation pour ainsi dire vague et impalpable, nous accédons à sa réalisation concrète. (1)
Alors que le marketing stratégique se situe en amont (direction générale), le marketing opérationnel est centré sur la mise en action du plan sur le terrain. Ces deux visages sont complémentaires, du fait des liens nécessaires de coopération et des transmissions réciproques d’informations. La cohérence est impérieuse entre le marketing et les équipes commerciales.


Le plan ne saurait ainsi être confondu avec stratégie. Il a un sens opérationnel et circonstancié, un sens en tout cas plus précis et plus tangible que les termes stratégie et politique. Comme Lendrevie & Lindon l’ont bien fait remarquer, « un plan est, par rapport à une politique ou une stratégie, ce que, dans de domaine de la composition musicale, l’instrumentation est par rapport aux thèmes ou à la mélodie ». (2)
Le plan marketing est un document formalisé et effectif énonçant les choix marketing opérés par l'entreprise. C’est un guide d’orientation – pour une période déterminée – des tâches à accomplir. Ce document décrit de façon pratique le cheminement à suivre et les différents moyens à mobiliser pour accomplir la ligne stratégique retenue. (3)

Il s’agit donc d’un document de référence, de la feuille de route de l'entreprise. Il est rédigé par le directeur marketing (ou un consultant) et sa taille est généralement de 5 à 30 pages. Les actions envisagées sont hiérarchisées en fonction des nécessités. Selon le cas, leur mise en œuvre peut être simultanée ou successive. Dans une PME, le plan peut porter sur l’ensemble des produits offerts ; dans une structure organisée par produit, par gamme ou par marque, il y a souvent un plan propre à chacune des grandes subdivisions. Dans un tel cas, le responsable marketing est tenu d’harmoniser les divers plans.

Le plan : un outil de planification

La démarche marketing se conçoit à la fois à moyen/long terme (marketing stratégique) et à court terme (marketing opérationnel). Pour cette raison, le plan d'action commerciale est un découpage dans le temps de la stratégie marketing. 
Deux paliers sont alors à distinguer :
- La planification stratégique relève du moyen/long terme – en pratique de 1 à 5 ans – et affecte toute l’entreprise. D’où, par exemple, un plan de développement des produits, un plan de recentrage (retrait des activités déficitaires)…
- La planification opérationnelle est à horizon court – inférieur à 1 an – affecte le travail d’équipes ou personnes déterminées et s'adapte en permanence aux réalités du terrain. Les plans à court terme, de nature tactique, sont ainsi d'une portée limitée. D’où, par exemple, un plan médias, un plan de ventes, un plan de promotion…

Cela étant, nombre de dirigeants de PME, ayant un goût du secret très prononcé (« ne pas donner l’alarme  aux rivaux »), prétendent pouvoir se passer d’une planification formelle. Ils pensent que le marché est trop dynamique pour qu’un plan soit pertinent, préfèrent en somme attendre que les problèmes se manifestent, s’habituent à fonctionner dans l’urgence.
Mais observons un joueur d'échec expérimenté. Certes, il réagit au fur et à mesure que la situation change, que les problèmes se posent, mais ses manœuvres successives sont prévues dans un plan déterminé. Il s'attache dès le premier mouvement à le mettre en œuvre… Faire l’impasse sur le PAC, c’est ne pas en voir tout l’intérêt comme outil de synthèse d’une réflexion, comme outil opérationnel et comme outil de suivi et de contrôle. Que gagne-t-on réellement à naviguer à vue ? Sans plan cohérent, doté d’objectifs précis et accompagné d’un calendrier de réalisation, peut-on agir sur le long terme, construire une image de marque, développer une notoriété ?

Le meilleur antidote à l’improvisation et l’éparpillement serait de planifier. Il est clair en effet que « la planification formelle cimente les projets de l'entreprise en un tout cohérent, condition indispensable à l’efficacité des stratégies ». (4) C’est grâce à la planification que les moyens les plus efficaces sont mis en œuvre pour obtenir les résultats escomptés dans les délais prévus.

Thami BOUHMOUCH
Novembre 2015
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(1) Cf. mon papier : Le marketing : une démarche en trois temps http://bouhmouch.blogspot.com/2015/05/le-marketing-une-demarche-en-trois-temps.html
(2) J. Lendrevie et D. Lindon, Mercator, éd. Dalloz, p. 526.
(3) Voir à cet égard les ouvrages de N. Van Laethem, L. body, Le plan marketing, éd. Dunod et de M. McDonald, Les plans marketing, éd. De boeck.
(4) Ph. Kotler, V. Di Maulo, G. McDougall, G. Amstrong, Le marketing de la théorie à la pratique, éd. Gaëtan Morin, p. 353.


31 octobre 2015

LA STRATEGIE EST DE NATURE CONFLICTUELLE


Série : Marketing stratégique 

« Dans un univers concurrentiel, il faut gagner sa place  au moyen d’une stratégie » Anonyme


Considérons le jeu d'échec : deux joueurs se partagent les pièces blanches et noires. Quel est le but du jeu ? Gagner. Le problème est donc clair. Y a-t-il une solution en soi, dans l’absolu ? Non, il n'y en a pas : cela dépend du déroulement du jeu. Certes, le joueur met en œuvre une stratégie dès le premier mouvement, mais il n’est pas seul à occuper le terrain. Le résultat final dépend autant de ses décisions que de celles de l'adversaire…
C'est le type de problème que doit résoudre le responsable marketing.

L'entreprise évolue dans un univers concurrentiel
Si l'on compare la lutte contre les concurrents à un jeu, la stratégie nous dit comment nous allons gagner. Or, dans un univers de rivalités, toute entreprise est directement affectée par l’action commerciale d'autres entreprises, progresse forcément à leur détriment. Chacune est tenue d'adapter sa stratégie en fonction des choix des concurrents les plus offensifs.
Une grande organisation en effet est regardée par une PME comme un concurrent dangereux ; à l'inverse, la première pourrait négliger la seconde. Il ne convient pas toutefois de sous-estimer un concurrent, encore moins de l’ignorer. Les grands revers commerciaux sont dus à une mauvaise appréciation de l'adversaire. Celui-ci, de toutes les façons, essayera inlassablement d'endiguer notre propre action, voire de nous distancer… De fait, il ne serait pas juste de dire que telle stratégie marketing est la solution de tel problème. Il faut constamment tenir compte de la concurrence (directe ou/et indirecte) ; il y aura toujours une meilleure offre en termes de produit, de qualité, de prix, de service.


En 2006, lorsque Attijariwafa Bank et BMCE Bank se sont engagées sur le marché des MRE (Marocains résidant à l’étranger), la Banque Populaire s’est trouvée attaquée sur son terrain traditionnel. Le tournant qui a été opéré par la suite dans son organisation a induit une orientation nouvelle et décisive. Pourtant, un dirigeant de cette banque, à qui on a demandé si une telle orientation était due à l’offensive des concurrents, a fourni cette réponse surprenante : « la politique du groupe n’est pas déployée par réaction aux choix de nos confrères ». (1) C’est une contre-vérité : une stratégie commerciale, à n’en pas douter, est toujours définie dans un univers concurrentiel ; elle est par essence dirigée contre des adversaires.
On se rappelle qu’en 1998, la chaîne Pizza Hut cherchait à acquérir une nouvelle place sur le marché et prendre des clients aux concurrents. Sa signalétique, entre autres, a été pour cela modifiée : utilisation de nouvelles couleurs (bleu et or à côté du rouge traditionnel) aussi bien au niveau de l'enseigne que du mobilier et de la décoration.
Au sein de l’entreprise, on s’aperçoit que l'implication du marketing a un caractère spécifique. Sur ce point, Swiners a écrit ceci : « Dans le département marketing où la réussite de vos stratégies dépend aussi et surtout des stratégies élaborées par vos concurrents, dans ce département à part où tous les problèmes sont des problèmes concurrentiels… on ne peut utiliser les procédures de prise de décision telles qu'elles sont appliquées par les fonctions production, finances, ou personnel ». (2)
Comprendre la dynamique concurrentielle est une composante essentielle de l'analyse stratégique. L’orientation d’une stratégie commerciale dépend du poids et de l'action de la concurrence. Les entreprises efficaces et innovatrices progressent au détriment des entreprises inefficaces et sclérosées. Le marketing, dans sa définition même, intègre nécessairement cette réalité : cela consiste à satisfaire le consommateur mieux que ne pourrait le faire le concurrent. Ne dit-on pas que la concurrence crée l'émulation ? (3)

Les stratégies sont par essence antagoniques
La compétition est l'état normal vers lequel tend le monde des affaires. Les stratégies sont conçues de manière à se protéger du concurrent et à tirer parti de sa faiblesse. Concevoir une stratégie marketing exige de bien connaitre les principaux concurrents, d’évaluer leur pouvoir compétitif et d’anticiper leurs actions (produits, prix, modes de distribution, communication). Le marché potentiel, ne l’oublions pas, est évalué compte tenu des dispositions estimées des principaux rivaux. (4)
Il apparaît que si les décisions marketing (de grande envergure) sont qualifiées de stratégiques, c’est parce qu’elles sont prises, non pas dans l'abstrait, mais toujours par référence à l'action des principaux concurrents. Lorsqu’en février 2007 Wana s'est implantée sur le marché de la téléphonie, nombre de clients ont été perdus pour les opérateurs Maroc Telecom et Meditel. Les parts de marché de ces derniers ont baissé. D'où le changement rapide de politique vis-à-vis des clients et du réseau de distributeurs.
Parce qu’un producteur se trouve en compétition avec des concurrents et de ce fait s’emploie à les surpasser, sa stratégie est intrinsèquement de nature conflictuelle. (5) Ce point vaut d'être souligné : « Il ne s'agit pas d'être en avance sur la demande. Il s'agit d'être en avance sur les concurrents. Etre le meilleur dans l'absolu ne veut rien dire et ne correspond à aucune réalité économique. Il faut être meilleur que les autres. C'est la loi du système concurrentiel ». (6)
L'entreprise agit ainsi en réaction aux changements de l’ordre établi et aux décisions des autres intervenants. La variable prix par exemple est souvent employée comme une arme pour conquérir des clients et des parts de marché. Lorsqu’un concurrent réduit ses tarifs, il convient d’analyser les raisons qui l’ont poussé à agir ainsi. A priori, une baisse de prix n’est pas un signe de bonne santé. Lorsque la baisse est persistante, nombre de questions viennent à l’esprit : le concurrent a-t-il trouvé des procédés de fabrication moins coûteux ou/et des fournisseurs moins chers ? En somme, dispose-t-il d’un avantage concurrentiel lui permettant de baisser durablement ses prix ?
Une stratégie de différenciation est à envisager lorsqu’un marché arrive à maturité avec de nombreux producteurs proposant quasiment les mêmes articles aux mêmes cibles et presque de la même façon. L’entreprise décide de s’appuyer sur des aspects divers du produit : caractéristiques propres, design, fiabilité, service après vente, etc. Pour se distinguer de ses concurrents, elle peut s'adresser à des catégories spécifiques de clients. Elle peut également développer des concepts novateurs pouvant lui assurer un positionnement particulier et une meilleure rentabilité. Le groupe 3M, entre autres, utilise sa formidable assise technique pour créer des marchés complètement nouveaux et, par là même, modifie les données concurrentielles des marchés existants. 

Thami BOUHMOUCH
Octobre 2015
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(1) I. Bennani Smirès, Revue Challenge Hebdo, 24/02 au 02/03/2007.
(2) J.-L. Swiners, Concurrence et stratégie, Revue Française de Gestion, juin-août 1983, p. 95. Je souligne.
(3) Cf. papier précédent : Le concurrent, un rival qu’il faut avoir à l’œil  http://bouhmouch.blogspot.com/2013/09/le-concurrent-un-rival-quil-faut-avoir.html
(4) Cf. article : Le marché, un champ de bataille  http://bouhmouch.blogspot.com/2011/10/le-marche-un-champ-de-bataille.html
(5) J. Lendrevie et D. Lindon, « Mercator », éd. Dalloz, p. 526.
(6) J.-P. Pécoul et M. Santi, Fortune faite. L’expérience des grands créateurs d’entreprises français du XXè siècle, éd. Dunod, p. 22.