Powered By Blogger

27 novembre 2014

L’EXPÉRIENCE/APPRENTISSAGE : QUEL EFFET SUR L’ACTE D’ACHAT ?


Série : Compréhension du consommateur


Le comportement humain est en majeure partie appris. Lorsque l'individu agit, il est supposé percevoir, mémoriser et se rappeler les informations présentes dans le milieu d’appartenance. Il acquiert l’expérience des faits vécus. Ce processus prégnant, appelé apprentissage, désigne en effet les « modifications intervenues dans le comportement d'une personne à la suite de ses expériences passées ». (1)

Expérience et réponses préétablies
Un jeune consommateur, dont l’expérience est limitée, tend à faire des achats sans comparer les marques et modèles proposés. Cela dit, l’apprentissage ne se limite pas à l’expérience personnelle stricto sensu ; il procède aussi du phénomène de socialisation. Rappelons que l'homme apprend à vivre et à fonctionner en société. (2) C’est au contact de son entourage que l’individu intègre les normes sociales et les dispositions d’esprit. La culture conditionne bel et bien les types de conduite. (3) La famille est le milieu le plus immédiat au sein duquel se forment les habitudes de consommation. (4)
En conséquence, l’apprentissage peut porter sur des informations simples, comme les caractéristiques d’une marque donnée, ainsi que sur des informations plus complexes, comme le mode d’utilisation d’un appareil, les normes vestimentaires et comportementales définies par le milieu social…
C’est ici le point majeur : l'expérience des faits tend à modifier notablement le comportement futur de l’acheteur. Celui-ci, dans son esprit, met en place des habitudes qui déclenchent une réponse préétablie. L’information est stockée dans sa mémoire, c’est-à-dire mémorisée. Elle est réactivée ultérieurement en cas de réachat (5) : l’individu fait alors appel à son expérience personnelle.
On s’aperçoit que lors de l’achat de biens banals, c'est-à-dire de produits de consommation courants (en général à prix bas), la réflexion est très limitée et le processus est routinier. Lorsque l’article acheté satisfait amplement le consommateur, la décision se réduit à son expression la plus simple : l’achat est répété, devient habituel. « On imaginera aisément ce que deviendraient les achats de cigarettes, de dentifrice, de lessive, de café, s’il fallait à chaque fois mettre en œuvre un processus conscient et complet de choix entre les produits, les marques, les qualités, les conditionnements, les magasins, etc. ». (6)
A l’inverse, dans le cas de produits anomaux, c'est-à-dire de produits d'achat réfléchi (risque perçu plus ou moins élevé), le consommateur est prêt à investir du temps pour évaluer les différentes offres proposées. Or dans les choix qu’il fait avec soin, l’apprentissage intervient également. Si tel individu a été satisfait de son imprimante Canon, il achètera par la suite un photocopieur Canon ; dans le cas contraire, il rejettera la marque. Ce phénomène, appelé généralisation de la réponse, revêt une grande importance pour les fabricants de produits différents sous une même marque. Il est à l'origine de la fidélité à la marque.

Implications marketing  
La théorie cognitive fait état du processus mental de traitement par le consommateur des informations transmises (stimuli commerciaux). Le message parvient d'abord dans la mémoire à court terme – dont la capacité est limitée. S’il retient réellement l'attention, il est ensuite transféré dans la mémoire à long terme. Une telle mémoire est en principe le lieu de stockage permanent des connaissances, mais l'individu oublie une bonne partie de ce qu'il apprend. 
Le comportement d’achat est en effet soumis à un phénomène d'oubli. C’est pourquoi l'apprentissage doit être régulièrement stimulé. L'entreprise est amenée naturellement à agir sur son public cible : le message publicitaire est répété pour qu'il soit appris, c’est-à-dire pour que l’information soit transférée de la mémoire à court terme à la mémoire à long terme. Au Maroc, plus de 60 % de la production de concentré de tomates est écoulée au cours du seul mois de Ramadan. Pour accompagner la frénésie des ventes, les producteurs font monter la pression publicitaire. Il s'agit d'entretenir la demande, de faire revenir la marque visée à l’esprit du public. Lors des achats routiniers, « les habitudes et donc les phénomènes d'apprentissage sont décisifs. La publicité dans ce cas joue plus un rôle de familiarisation ou de rappel à la mémoire que de persuasion. Elle doit être simple, répétitive et fait souvent appel à des éléments d'identification forts, d'ordre visuel ou sonore ». (7)
La pratique publicitaire est de fait une action sur la mémoire du consommateur ; elle favorise sa fidélité par une présence régulière d’une marque donnée dans son esprit. De nombreux travaux se sont attachés à comprendre les mécanismes par lesquels les individus sont susceptibles de mémoriser de manière optimale les messages auxquels ils sont exposés. L'entreprise cherche à accroître ses ventes en suscitant l'achat répété de ses produits ; elle fait jouer à son avantage le principe de généralisation.
Cela amène à se demander : une telle répétition se traduit-elle par le phénomène de conditionnement, tant décrié par les défenseurs du consommateur ?
Les théories de l’apprentissage (béhavioristes), largement utilisées en publicité, nous apprennent que le produit mis en avant est associé à un stimulus destiné à induire une réaction positive. A force de répétitions, le produit lui-même tend à susciter une réponse positive. Telle marque d’eau minérale par exemple est associée à un décor de plein air et de vitalité. Elle finit par évoquer la santé et la pureté naturelle. A ce titre, Boncey écrit : « Les préférences et choix des consommateurs, pour une large part, ne sont en fait ni plus ni moins que des réponses conditionnées à des stimuli publicitaires. Depuis les temps les plus reculés, nous sommes tous constamment bombardés d'images invitant à l'achat […] ». (8)  

L'individu serait « programmé » pour répondre de manière uniforme à certains stimuli (excitations). C'est à ce but suprême que les publicitaires s'efforcent de parvenir : faire réagir le sujet dans le sens voulu par l'entreprise. N’est-ce pas cela que visent les spots télévisés, la P.L.V. dans les grandes surfaces, les stop-rayons et le placement des friandises en sortie de caisse ?... Pour autant, il n’est pas établi que les phénomènes d’apprentissage soient associés foncièrement à l’idée de reflexes conditionnés. C’est en tout cas l’avis de Ladwein : « Cette association malheureuse suggère que l’on peut forcer l’apprentissage sans que l’individu soit en position de résister. Une telle conception est profondément caricaturale et ne laisse pas suffisamment de place à la capacité de l’individu à refuser de se soumettre à une démarche dans laquelle il n’est pas impliqué ». (9)

Thami BOUHMOUCH
Novembre 2014
_________________________________________
(1) Philip Kotler et Bernard Dubois, Marketing management, éd. Publi-Union, p. 200.
(2) Cf. papier précédent : Le culturel n’est pas hors du territoire du marketing http://bouhmouch.blogspot.com/2014/03/le-culturel-nest-pas-hors-du-territoire.html
(3) Cf. papier précédent : Comment la culture façonne nos choix de consommation  http://bouhmouch.blogspot.com/2014/09/comment-la-culture-faconne-nos-choix-de.html
(4) Cf. papier précédent : Consommation : la répartition des influences dans la famille  http://bouhmouch.blogspot.com/2014/06/consommation-la-repartition-des.html
(5) Ce mot ne se trouve pas dans les dictionnaires. Malgré tout, je le préfère au terme rachat, qui signifie couramment « prise de contrôle d'une entreprise », ou « acquisition par une entreprise des actions constitutives de son propre capital social », ou « achat d’une chose qu’on vient de vendre ».
(6) J. P. Helfer et J. Orsoni, Marketing, éd. Vuibert gestion, p. 124.
(7) B. Dubois et M. Vanhuele, Comportement du consommateurhttp://www.universalis.fr/encyclopedie/consommation-comportement-du-consommateur/
(8) Russel Boncey, Mind your business, éd. Techniplus, p. 46. Je traduis.
(9) Richard Ladwein, Le comportement du consommateur et de l’acheteur, éd. Economica, p. 201.

14 novembre 2014

MESURER LA MOTIVATION ET AGIR


Série : Compréhension du consommateur


L'acte d'achat est comparable à un iceberg. Les raisons cachées (réelles) qui sous-tendent la décision revêtent une importance cruciale. Il convient d’identifier leur nature et mesurer leur intensité pour pouvoir comprendre les réactions des consommateurs. Au-delà de l'étude des besoins physiologiques, la notion de motivation s'est rapidement imposée à l'esprit. Comment alors la mesurer ? Comment en tenir compte, l’influencer conformément aux vœux de l'entreprise ?

Etudier les motivations
Pour être efficace, le marketing se doit de dévoiler les structures latentes de l’acte d'achat. L’étude des motivations, c’est l’étude du pourquoi… Elle a pour objet d'expliquer pourquoi l’acheteur prend telle décision, fait tel choix, adopte telle attitude ; dans quelle situation il lui arrive d’acheter sur un coup de tête ; pourquoi il attache de l'importance à des marques particulières ; quelle signification il accorde aux couleurs (conditionnement), etc.  
L'identification des motivations par inférence, c’est-à-dire à partir des actions du consommateur n'est pas pertinente. Elle risque d’être erronée dans bien des cas, car les individus peuvent agir de la même manière, adopter les mêmes choix sous l’influence de motivations différentes. A n’en pas douter en effet, « les situations de consommation et d’achat sont d’une telle diversité qu’il semble peu probable de pouvoir y appliquer un modèle intégrateur unique. L’achat d’un même produit admet par exemple des motivations très différentes selon les acteurs considérés, au même titre qu’un besoin identique peut conduire à l’achat de produits très différents ». (1)

La question du pourquoi est une question fondamentale qui intrigue les chercheurs en marketing. On en vient à recourir à des études longues et coûteuses (menées par des psychosociologues). Les techniques mises en œuvre, de nature qualitative, portent notamment sur les entretiens individuels (une personne à la fois est interrogée) et les réunions de groupe (8 à 12 personnes sont sondées en même temps)… Elles consistent à interviewer le sujet en profondeur. Elles cherchent à l’explorer,  à atteindre son inconscient ou son subconscient, à identifier ses mobiles profonds – en un mot, à élucider à élucider ce qui se passe dans sa tête lors de l'achat…
De ce fait, les méthodes utilisées « ont pour caractéristique commune de ne pas enfermer les personnes interrogées dans un cadre restreint de réponses préétablies ». (2) Elles visent à comprendre les mécanismes psychologiques des conduites de l’individu, en allant au-delà de son discours apparent – à la fois superficiel et marqué par une certaine rationalité.
Les motivations, une fois détectées, donnent naissance idéalement à des profils d'acheteurs potentiels. Mais la tâche est délicate et les critiques ne manquent pas : avant tout, l’échantillon est forcément restreint (10 à 50 personnes) et ainsi ne saurait être représentatif au sens statistique. L'identification même des motivations est difficile, du fait qu’elles ne sont pas toujours conscientes : le sujet n'est pas toujours en état de se représenter les véritables motifs qui déterminent son comportement. Les motivations ne sont pas non plus avouables : le sujet peut chercher à les dissimuler, à les maquiller. Si bien que les conclusions sont hypothétiques et la prudence est de mise.


Implications
Le praticien du marketing cherche à bien comprendre les mobiles profonds de l’acte d’achat afin de concevoir une offre adaptée, positionner son produit par rapport à un segment précis du marché. Il ne perd pas de vue le fait (évident) que l’individu ne considérera l'achat d'un produit que dans la mesure où il est motivé à le faire. Le consommateur ne peut à chaque fois satisfaire ses besoins par des achats, procède par suite à un arbitrage en fonction des priorités du moment (hiérarchie de Maslow). Manifestement, « pour que l'action intervienne, il faut que le besoin ait atteint un niveau d'intensité suffisant pour devenir un mobile ». (3) Il est clair également qu’au-delà de son aspect fonctionnel, le produit a une dimension symbolique. L'acheteur est sensible aux performances mais aussi à des éléments visuels susceptibles de déclencher des émotions – des éléments qu'il s'agira de considérer lors de la conception du produit.
L'intérêt pour une entreprise réside dans sa capacité à agir sur les motivations, à les provoquer (transformer un besoin en motivation) et donc à susciter l'achat. Le discours publicitaire en particulier est logiquement marqué par les motivations du public cible. A l'image un peu des chiens du physiologiste Pavlov, « la répétition d'un message sonore ou visuel peut entraîner un besoin lorsque l'individu se retrouve dans une situation similaire à celle du message (c'est le cas dans la publicité) ». (4) Jadis, lorsque la société canadienne Mac Cain, leader mondial de la frite surgelée, voulait introduire la « frite au fournisseur » sur le marché français, elle avait essuyé un échec. Les consommateurs français tenaient beaucoup à leur bassine à frites et n’étaient pas favorables aux produits précuits. Du coup, le produit a été rebaptisé « frite légère », avec un packaging adéquat et a connu un grand succès. (5)
Cela ouvre la voie à des actions de pression possibles sur l'inconscient des consommateurs et partant à l’accusation adressée au marketing de pouvoir manipuler les comportements en créant des réflexes conditionnés… A y regarder de près, les praticiens peuvent-ils réellement exercer un contrôle sur les acheteurs ? « On s’imagine volontiers que le simple fait de comprendre le comportement individuel permet forcément sa manipulation. Une telle idée n’est pas défendable. La mise en œuvre opérationnelle d’un processus d’influence est autrement plus difficile que sa compréhension ». (6) De plus, il est établi que l’acheteur cible ne saurait être influencé par n'importe quel stimulus. Son degré de motivation pour un produit dépendra largement de ses expériences antérieures (apprentissage) et de son degré d'implication à l’égard du produit.

Thami BOUHMOUCH
Novembre 2014
_________________________________________
(1) R. Ladwein, Le comportement du consommateur et de l’acheteur, éd. Economica, p. 14.
(2) J. Bon et P. Grégory, Techniques marketing, éd. Vuibert Gestion, p. 25.
(3) P. Kotler et B. Dubois, Marketing management, éd. Publi-Union, p. 196.
(4) Y. Cordey et B. Perconte, Connaître le marketing, éd. Bréal, p. 36.
(5) Cf. B. Prouvost, Innover dans l'entreprise, les clés pour agir, éd. Dunod, p. 121.
(6) R. Ladwein, op. cit.

5 novembre 2014

LES MOTIVATIONS D’ACHAT : TYPOLOGIE ET INTERACTION


Série : Compréhension du consommateur


Les motivations sont les structures cachées du comportement humain, constituent les raisons subjectives qui incitent à l’achat. Elles sont variées et font l’objet de classifications en fonction de leur nature. La typologie de H. Joannis distingue trois types : hédoniste, oblative, d’auto-expression, (1) auxquels on peut ajouter la motivation rationnelle/utilitaire.

Motivation hédoniste 
Elle est basée sur la recherche de plaisirs personnels, découlant de la consommation d'un produit. (2)
Le plaisir gustatif est l'une des motivations les plus importantes. C'est la principale ou même la seule dans le cas des produits de gourmandise. C’est bien pour se faire plaisir (par gourmandise) que les gens vont manger une glace ou un chocolat. Cette motivation a donné lieu au message publicitaire  du magasin La Dragée d'Or (Casablanca) : « Succombez au petit plaisir d'un grand chocolat ». Elle a aussi fondé le spot de Danone : « Avec le nouveau Passion, partageons le plaisir d'un grand yaourt ».
L’individu éprouve également du plaisir, d'un point de vue esthétique, par la possession d’un objet. L'achat est effectué pour le confort personnel, pour « profiter de la vie ». Il en est ainsi du plaisir de posséder un meuble, un bibelot ou un tableau, de porter un sac à main « signé », de conduire une voiture rutilante. Rappelons-nous le slogan  de BMW : « Le plaisir de conduire ».
Le sentiment de bien-être et le plaisir des sensations agréables sont procurés lors de l’achat d’un parfum (odorat), d’une serviette moelleuse (toucher), des produits destinés au bain ou la douche. Les salles de bain sont devenues des lieux de plaisir avec l’arrivée de l'hydro-massage, du jacuzzi et du générateur de vapeur. De là le message de  la marque Grohe : « L’eau, élément vital mais aussi source de plaisir intense ».
La motivation hédoniste explique la recherche de la facilité et de la commodité lors de l'achat par exemple d'un produit électroménager. Le consommateur utilise un appareil pour supprimer des tâches laborieuses.
A ces plaisirs physiques, enfin, il convient d’ajouter les plaisirs intellectuels : lire une revue ou un livre, découvrir un site historique ou un monument, regarder un programme de télévision...

Motivation oblative 
L'achat en l’occurrence est effectué pour apporter de la satisfaction à autrui, faire plaisir à ceux qui nous entourent. (3) C’est le cas d'une personne désirant acheter un article prestigieux pour en faire cadeau (famille, amis).
C’est le cas aussi des parents qui achètent des habits et aliments particuliers pour leurs enfants. Au-delà du sentiment naturel de devoir ou d'obligation morale (dévouement), il y a bien là une volonté de faire plaisir. A l'occasion de la fête d’Achoura l’achat de jouets est effectué pour faire plaisir à l'enfant. Le désir de ne pas le décevoir, de favoriser son épanouissement peut l’emporter sur la contrainte du prix.

Motivation d’auto-expression 
Cette motivation trouve son origine dans le besoin d'exprimer sa personnalité réelle ou souhaitée (montrer qui on est ou qui on voudrait être), d'être reconnu par autrui. L’individu choisit une marque de luxe, un magasin prestigieux, une destination de vacances onéreuse pour se valoriser, manifester la réussite sociale…  
Une telle motivation est à l'origine de l'achat de produits ostentatoires, effectué dans le but d'impressionner l’entourage. Chaque individu se fait une image de lui-même – l'image de soi – les produits qu'il achète sont un moyen de l'exprimer. Cela nous renvoie aux papiers précédents au sujet du groupe de référence et la classe sociale. (4) L'acquisition d'un modèle de voiture montre que son acquéreur a une situation matérielle aisée. Elle suscite l'envie. La voiture est de plus en plus considérée comme le reflet de la personnalité du conducteur. Les BMW sont surtout achetées par ceux qui ont gardé un « esprit jeune ». Séduits par le moteur et le design, ils sont en quête du plaisir de conduire.
La motivation à l'origine de l'achat d'un type donné de vêtement est de s'extérioriser, de vivre avec son temps, de suivre la mode, de paraître jeune... Il en est de même du choix d'une eau de toilette, d'une activité sportive, d'un restaurant, etc. « Une femme qui va acheter des produits de maquillage [...] essaie de résoudre un problème, éventuellement de transformer un rêve en réalité ». (5) Le téléphone portable au Maroc est devenu accessible à tous. L'outil devient un jouet. On l'affiche comme un signe de richesse et surtout de modernité. D'aucuns n'hésitent pas à le garder lorsqu'ils font du footing (alors qu’ils sont censés se détendre).                                                                                   
Motivation rationnelle ou utilitaire 
L'acheteur considère (à tort ou à raison) qu'un produit lui est utile pour satisfaire un besoin précis. Il est poussé par un souci d'efficacité, de fiabilité, de rendement ou d'économie. Il recherche le meilleur prix, le meilleur rapport qualité-prix (électroménager) ou le coût de fonctionnement le plus bas (imprimante). Il en est ainsi des produits à usage professionnel, mais également ceux à usage personnel ou familial.
Examinons le cas des jouets. Les parents agissent suivant deux logiques opposées. Les uns sont poussés par une recherche d'efficacité et de fiabilité. Le souci de sécurité les amène à choisir des produits de qualité, à éviter les « rossignols ». L'idée est de favoriser l'éducation de l'enfant, quitte à supporter un prix élevé… Les autres, les moins favorisés, sont guidés par un souci d'économie. D'où la recherche du prix le plus bas, le choix de jouets « de bataille », de « jouet-bricole », à durée de vie très limitée. L'acheteur considère que le jouet est voué, quoi qu'on fasse, à être cassé dans les heures ou jours qui suivent, que les enfants ne s'y intéressent qu'au début, après ils veulent autre chose. Le jouet ne doit donc pas être cher. L'élément prix est déterminant (compte tenu du revenu). L'achat est motivé d'abord par le refus des dépenses inutiles.
Le souci de santé, de diététique peut pousser l'individu à rechercher des produits alimentaires sains, sans OGM, sans cholestérol, sans additifs (colorants, conservateurs, antioxydants…), à éviter les produits nocifs (alcool, tabac, matières grasses). Le souci de sécurité amène à acheter des produits munis d'un système ad hoc (siège automobile pour bébés, appartements avec structure antisismique). L'achat d’un produit comme le carburant correspond à une motivation purement fonctionnelle : la nécessité impérative d'alimenter le moteur de la voiture.

Le plus souvent, les motivations sont multiples et agissent conjointement.
Les achats de voitures sont réalisés à partir de critères rationnels (fonctionnels) et émotionnels. L’acheteur d’un modèle en vogue est poussé par le plaisir de conduire (motivation hédoniste) et par la volonté d’afficher sa personnalité ou/et sa réussite sociale (motivation d’auto-expression). En même temps, il se soucie des attributs mécaniques (motivation rationnelle). Tels parents inscrivent leur enfant dans un établissement privé coûteux, pour la qualité de la formation dispensée (motivation utilitaire), pour lui faire plaisir (motivation oblative), pour manifester leur condition matérielle et être valorisés par les autres (motivation d'auto-expression).
Les motivations peuvent se contredire, entrer en conflit. Par exemple, tel individu est incité à souscrire à une assurance-vie en faveur des membres de sa famille. L’affection qu’il porte à ses proches le conduit à accepter le produit, mais le besoin de sécurité (ne pas penser à la mort) pourrait le conduire à y renoncer. Ce besoin se transforme ainsi en obstacle et empêche l’achat. (6)

Thami BOUHMOUCH
Novembre 2014
_________________________________________
(1) Cf. Henri Joannis, De l’étude de motivation à la création publicitaire et à la promotion des ventes, Dunod 1965.
(2) Hédonisme : système philosophique qui fait du plaisir le but de la vie (Larousse).
(3) Oblatif : qui fait passer les besoins d'autrui avant les siens propres (Larousse).
(4) Cf. Pressions comportementales : le poids du groupe de référence, in : http://bouhmouch.blogspot.com/2014/07/pressions-comportementales-le-poids-du.html (juillet 2014) ; Classe sociale : les besoins en symbole, in :  http://bouhmouch.blogspot.com/2014/08/classe-sociale-les-besoins-en-symbole.html (août 2014).
(5) Théodore Levitt, Réflexions sur le management, éd. Dunod, p.147.
(6) Cf. Lendrevie et D. Lindon, Mercator, Dalloz, p. 143.