Powered By Blogger

5 octobre 2020

 Clients internes : le nécessaire épanouissement des individualités 


Série : Marketing



Dans le monde des affaires, l'aptitude à l'innovation est plus que jamais le maitre-mot. L’innovation récurrente est la seule manière de pouvoir satisfaire un marché aux attentes sans cesse renouvelées. L'entreprise, aussi faibles que puissent être ses coûts de production, ne peut subsister si elle ne satisfait pas à cette obligation. Ce n'est que si elle devient un bouillon d'innovation et de créativité qu'elle pourrait faire face aux défis et menaces. 
A y regarder de près, cet impératif n'appelle pas de réponses strictement techniques. La capacité d'innover n’émane pas machinalement d’un acquis de procédés et de savoirs, ne se décrète pas ; elle procède d'un état d'esprit. C’est un tel état d'esprit qu’il s’agit de susciter et d’encourager. Le groupe doit être en mesure de rompre avec les pesanteurs de la routine, d'introduire des idées nouvelles et de les mettre rapidement en application. Dans une organisation, il n'y a pas d'employés inutiles. Du côté des cadres, il est ainsi nécessaire de bannir le phénomène de l’exclusive, du mépris catégoriel, du confinement dans la tour d’ivoire.

Le changement est une action sur les structures et une action sur les hommes. Ces deux types d'action doivent être associés dans le même processus stratégique. Une convergence entre les deux est nécessaire. De là l'apparition de nouvelles règles du jeu. On ne peut assurément faire fonctionner une entreprise par diktat. Le changement doit être accepté par tous les membres du groupe. Ceux-ci se donneront au travail s'ils sont convaincus, impliqués, motivés. Il faut faire avec toutes les personnes concernées, par contre ou en dehors. Il s’agit de valoriser les compétences individuelles et collectives, de passer d'une culture d'efforts à une culture de résultats. Les collaborateurs doivent pouvoir tirer parti des occasions favorables qui se présentent, réagir efficacement aux opportunités et menaces issus de l'environnement. Ils doivent pour cela faire preuve de flexibilité, c'est-à-dire être apte à modifier en peu de temps leur orientation et leur fonctionnement. Un bouleversement des structures et procédés, toutefois, peut être un danger : les acteurs embarqués dans un maelström d’incertitudes peuvent s’alarmer en perdant leurs repères traditionnels.

D’un autre côté, l’employé n'est jamais seul. D'autres que lui ont également des rôles à jouer, des objectifs à atteindre. Les membres du groupe sont en interaction et cherchent à agir en fonction du pouvoir dont ils disposent. Une structure, à un moment donné, n'est que la cristallisation d'un équilibre de pouvoir temporaire. Elle réussira si elle est acceptée par suffisamment d’intervenants et permet à chacun d'être satisfait. L'entreprise est une coalition d’individus ayant des intérêts et le désir de les préserver. Diriger une organisation consiste alors à dégager un compromis possible entre des aspirations contradictoires. L’approche théorique conventionnelle ne peut être utilisée de façon efficiente. Lorsqu'un patron illettré gère un personnel non qualifié, selon un modèle autoritaire, le système fonctionne. Lorsqu'un dirigeant diplômé cherche à gérer un personnel non qualifié suivant un modèle managérial moderne, il y a conflit entre deux visions antinomiques.


Il n'y a pas d'organisation, ni d'acteur sans pouvoir. Le cadre dirigeant, par son savoir-faire, son expérience, sa provision d'informations, ses contacts avec l'extérieur ou simplement par sa connaissance des règles, peut chercher à avoir la haute main sur son entourage, à le subordonner. Le changement que l'on essaie d'apporter à un système implique une transformation du dispositif de pouvoir. Il se trouve toujours en conflit avec le pouvoir existant. Toute action de changement qui n'a donc pas pour base une connaissance suffisante du système sur lequel on veut agir et sur une appréciation raisonnable des principes et régulations régissant ce système provoque immanquablement des réactions de défense. L’organisation s'adapte par une série d'ajustements progressifs. Pour éviter les dysfonctionnements, la connaissance scrupuleuse des forces en jeu permet d'amorcer la mobilisation des ressources et capacités des acteurs.

Ce n'est qu'en accomplissant au mieux les tâches qui lui sont assignées que l’employé peut atteindre ses objectifs personnels. Il dépend de l’organisation… et vice versa ! A terme, un certain équilibre s'instaure dans la relation entre l’un et l’autre. Le système repose sur la coopération nécessaire de tous les collaborateurs impliqués… Il est regardé comme un ensemble de mécanismes assurant la coordination d'activités différentes exécutées en son sein. Les hommes constituent la communauté où l'entreprise puise ses forces. Les meilleures idées de produits nouveaux et les stratégies les plus compétitives sont sans effet si elles ne sont pas mises en œuvre par des individus conscients de leur implication et responsabilité.


A n’en pas douter, le développement personnel et l’équilibre moral des cadres est primordial. Ceux-ci ont besoin de confiance, pas de remontrances ou d'avertissements. L’idéal est de faire de l'organisation un endroit où la dignité de chacun est respectée, où on est content de venir travailler. Pour reprendre une réflexion bien connue, une ambiance propice à la concorde commence au parking de la société : si une pancarte porte la mention "place réservée au directeur général", c'est qu'il s'agit d'un management obsolète.
De plus, il y a danger à voir l’organisation comme un ensemble de rouages préconçus. La compétence professionnelle ne suffit pas. Outre les impératifs de la technique et la gestion, l'humain se retrouve dans chaque projet. L’écoute interne (ou veille sociale) traduit la volonté de construire l'entreprise par et autour de l'élément humain. C'est une écoute permanente des aspirations et des états d'âme des acteurs sur lesquels reposent foncièrement les actions envisagées. L’épanouissement social et émotionnel, le savoir-être sont une partie importante de l'identité commune. C'est la foi qui vous donne envie de fournir le maximum d'efforts. Le système des valeurs interne prend toute son importance.

L'entreprise, en conséquence, est pourvue d’une culture parce qu'elle produit ses propres représentations et perceptions de la réalité. Elle se présente comme un ensemble cohérent de codes et de significations que tout partenaire doit adopter pour être intégré. Mais une telle culture ne prend forme et ne se déploie que si deux conditions sont remplies. Non seulement la hiérarchie doit faire l’effort d’accepter l'erreur, elle se doit de favoriser la responsabilité non le fonctionnariat, éviter à tout prix l'enlisement bureaucratique. On sait que les structures les moins pesantes sont les meilleures, des structures qui limitent l'inertie et les délais de réponse.

Ne perdons pas de vue enfin que le milieu culturel d'appartenance influe nécessairement sur la culture d'entreprise. En Afrique, l'entreprise ne saurait être appréhendée sans sa dimension affective. Le sentiment d'appartenance communautaire explique le rôle joué par la famille élargie, la portée de l'âge en tant que symbole de la sagesse et de l'autorité, la position du patron, considéré comme un chef de village ou de clan, etc. Les liens de solidarité, les besoins de relations et d'amitié passent généralement avant le besoin d'accomplissement individuel. Au Japon, le respect des supérieurs, la discipline stricte, l'accomplissement de soi par le travail sont des valeurs essentielles. Vouloir escalader trop rapidement l'échelle sociale est mal vu. Il s’agit d’être patient et persévérant… Le champ de référence culturel influe ainsi sur la manière dont les individus s'insèrent dans la structure et vivent leurs relations de travail. Il exerce une action directe sur la dynamique interne de l'entreprise, sur l'action collective de ses membres, sur leur perception de l'organisation elle-même.

Thami BOUHMOUCH

Octobre 2020